Publié le Lundi 21 septembre 2015 à 09h38.

CGT : Rentrée en sourdine

Rude concurrence en cette rentrée pour Philippe Martinez, avec la parution du livre de Thierry Lepaon revenant sur les conditions de sa mise à l’écart du poste de secrétaire général de la confédération. Cette cohabitation involontaire est significative des contradictions qui continuent de lézarder la CGT.

Le nouveau secrétaire général doit asseoir son autorité sur la confédération, c’est-à-dire dans le dédale des appareils (fédérations, UD, gros syndicats, multiples structures « amies ») défendant chacune leurs prérogatives. C’est ce qui explique le programme de 2 000 rencontres avec les syndicats, les syndiquéEs, et la programmation des huit meetings décentralisés de cette rentrée. 

Préparer le 51e congrès...

Le nouveau secrétaire général est en fait en campagne électorale préparatoire au 51e congrès de la confédération. Pas question de retomber dans les travers du calamiteux passage de témoin entre Bernard Thibault et Thierry Lepaon.

Dans les rencontres avec les syndicats, la direction peut toucher du doigt les difficultés rencontrées par les militantEs sur le terrain tout en pesant les exigences en termes d’orientation. Si les difficultés du quotidien poussent souvent vers un repli, un « recentrage », elles font aussi émerger l’exigence de positionnements plus clairs par rapport au gouvernement et d’initiatives nationales permettant de dépasser ces difficultés.

De la même façon, les meetings illustrent ces contradictions : des affluences variables et des ambiances tièdes qui résultent des difficultés de mobilisation et de l’absence de perspectives mobilisatrices.

… ou une rentrée combative ?

Mais ces initiatives, essentiellement à usage interne, ne suffisent pas à faire une rentrée syndicale à la hauteur des attaques patronales et gouvernementales. Et c’est bien là que se situe le deuxième volet des contradictions de la CGT. Sans projet politique, stratégique, la direction confédérale ne cherche pas à construire une opposition claire face au gouvernement. Cela se traduit par des propos ambigus quant au positionnement par rapport à la conférence sociale qui aura en son cœur les attaques contre le droit du travail. Les campagnes sur le coût du capital, outre ses ambiguïtés de fond, et pour la réduction du temps de travail sont en grande partie justes, mais elles ne constituent pas des objectifs de mobilisation en cette rentrée.

De même, la campagne sur la répression antisyndicale, malgré le caractère peu unitaire de la journée du 23 septembre, est nécessaire et indispensable. Mais même avec sa prolongation le 16 octobre par le rassemblement à Annecy en soutien à l’inspectrice du travail en butte à une répression administrative et judiciaire exigé par la direction du groupe Téfal, cela ne saurait « faire » une rentrée.

Victime des hésitations syndicales, la reprise de la mobilisation dans les hôpitaux, y compris à l’AP-HP, est difficile, alors que le positionnement par rapport au PPCR (Parcours professionnels, carrières et rémunérations) est inaudible au prétexte de consultation des syndiquéEs...

Refuser l’attentisme

En fait, malgré une dénonciation claire du rapport Combrexelle, on attend la mise en place d’un véritable plan de mobilisation contre les projets gouvernementaux, associant syndicats, organisations politiques, associations. La journée du 8 octobre, plantée dans le décor comme prolongation de la journée du 9 avril... six mois plus tard (!), apparaît trop générale, trop abstraite pour pouvoir prétendre être une étape dans le développement des mobilisations en cours.

Pourtant l’heure n’est pas à l’attentisme. Le référendum/sondage qui vient de se dérouler chez Smart fournit un cas d’école pour la mise en œuvre des projets d’un patronat si bien aidé par le gouvernement : prendre les syndicats en étau entre les exigences patronales et les craintes, les hésitations de salariéEs qui ne perçoivent pas de volonté d’en découdre nationalement de la part de leurs organisations. La CGT reste encore le plus souvent le syndicat « en bas » qui dit non, qui s’oppose. Et ses directions, ses dirigeants sont souvent perçus comme décalés par rapport à celles et ceux qui se battent au quotidien.

Robert Pelletier