Entretien. La nouvelle ministre du Travail, que l’on nous présente comme la DRH de l’entreprise France, a lancé une bombe début septembre en déclarant que les contrats aidés étaient « coûteux » et « inefficaces ». À la clef : la suppression de plus de 100 000 emplois aidés, notamment dans le secteur associatif.
Précaires et mal payées aujourd’hui, des dizaines de milliers de personnes seront poussées vers le chômage et les minimas sociaux dans les mois qui viennent. Dans ce contexte, les salariéEs bénéficiaires des emplois aidés (des contrats uniques d’insertion principalement) commencent à se rassembler pour défendre leur emploi et leurs droits. Il y a quelques jours naissait le « collectif des coûteux et inefficaces ». Nous avons rencontré Manon et Marc, tous les deux salariéEs de la radio associative FPP.
Pourquoi les associations ont-elles recours aux contrats aidés ?
Principalement parce qu’elles n’ont pas assez d’argent pour payer des salaires « normaux ». Dans de très nombreux cas, les dotations de l’État et des collectivités territoriales ne cessent de baisser, les associations sont bien souvent devenues très fragiles. Elles recourent alors à des emplois aidés, souvent pour faire des tâches qui sont assez complexes. C’est la précarisation des associations qui crée la précarité de leurs salariéEs.
Pourquoi accepte-t-on un contrat aidé ?
Il faut d’abord dire que les contrats aidés sont majoritairement des femmes, et qu’ils sont un facteur de précarité important. Ensuite sur la question de l’acceptation de ce type de contrat, on peut déceler deux cas. Le premier c’est celui où Pôle emploi t’envoie/t’oblige à accepter un contrat « d’insertion », avec un travail pénible et non choisi, et la plupart du temps à temps partiel.
Le second cas, ce sont des personnes allocataires des misérables minimas sociaux qui trouvent un emploi dans une structure sympa dont elles partagent les valeurs, qui leur permet de toucher une somme un peu plus importante que les minimas sociaux et qui leur offre un « statut » qui donne accès à certains services (type cantine scolaire ou bail). Néanmoins, le contrat aidé reste très précarisant car c’est, encore une fois, un contrat à temps partiel qui oblige à cumuler plusieurs emplois. Et pour rappel le contrat aidé reste le seul CDD qui n’ouvre pas le droit à la prime de précarité.
Vous pouvez nous parler de la mobilisation actuelle pour le maintien des contrats aidés ?
Les contrats aidés concernent plus de 300 000 personnes. Au-delà du cas des personnes directement touchées par leur gel, ce sont des structures qui sont mises à mal, les associations de quartier, mais aussi certains services publics qui y ont recours. L’enjeu de cette mobilisation est d’alerter sur ce plan de licenciement d’une envergure jamais vue et du coup de massue porté aux associations et services publics. Après plusieurs mobilisations locales et très diverses sur ce thème, nous avons créé un collectif en Île-de-France, « les coûteux-ses et inefficaces » pour tenter de fédérer toutes les personnes concernées, employéEs, employeurs et bénéficiaires. Nous avons ainsi organisé à un rassemblement le 26 septembre devant le ministère de l’Économie. Pourquoi ce ministère ? Car c’est ici que se décident les coupes budgétaires dont nous faisons les frais, et le 26 septembre car c’était la veille du rendu des arbitrages concernant les nouveaux critères d’attribution des contrats aidés.
Propos recueillis par Pierre Baton