On sent une inquiétude monter parmi les responsables politiques, les élus départementaux, les responsables d’associations institutionnelles sur les conséquences sociales de ce deuxième confinement. Ils ont de quoi. Les effets du premier ne sont pas encore effacés qu’une double peine vient frapper les ménages les plus précaires, entre autres et notamment en ce qui concerne le logement.
Le chômage est en hausse à presque 10 %, les distributions alimentaires ont repris dans les quartiers, ce qui révèle la baisse ou l’absence de revenus, la fondation Abbé Pierre estime le nombre de personnes à la rue à 300 000, chiffre qui a doublé depuis 2012, les bailleurs de leur côté s’inquiètent de la paupérisation des locataires du parc HLM et de son effet sur l’encaissement des loyers. Troussel, président du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, négocie avec le pouvoir la reprise du RSA par l’État et une centaine de maires dans une lettre à Macron demandent un milliard pour « les territoires en décrochage ».
Aides complexes
Lors du premier confinement une revendication avait été avancée d’un moratoire sur les loyers selon l’idée « pas de revenus, pas de loyers ». Le DAL avait fait campagne, appelant à ne pas payer son loyer pour imposer une négociation. Mais le gouvernement, soutenu par les bailleurs, s’en était tenu à un principe « le locataire doit payer son loyer » craignant un décrochage de ceux-ci, alors que dans le même temps il ouvrait en grand les vannes de la dette pour les entreprises.
Lors de ce deuxième confinement c’est la même chose. Plutôt que d’intervenir directement sur les loyers, des aides sont mises en place, par les Fonds de solidarité du logement départementaux, par Action logement, par l’accès aux APL, toutes complexes, avec constitution de dossier par des travailleurEs sociaux, qui laissent des ayants droit sur le bord de la route.
Interdire les expulsions locatives
Par ailleurs qui dit dettes de loyer dit procédures juridiques engagées par les bailleurs ou les propriétaires. Elles ne sont pas interrompues. Le gouvernement avait prolongé la dernière trêve hivernale au 10 juillet mais avait refusé de tout renvoyer à l’année prochaine. Il est clair que cette échéance va être critique et qu’on risque de voir se multiplier les expulsions pour celles et ceux qui n’auront pas su se défendre.
Particulièrement menacés, les locataires d’un propriétaire privé et ceux qui ont signé un plan d’apurement de la dette et qui ne tiendraient pas leurs engagements. D’ores et déjà la date du 31 mars 2021 est obsolète et le gouvernement doit prendre immédiatement un moratoire sur les procédures judiciaires et une mesure d’interdiction des expulsions locatives qu’il doit imposer aux bailleurs et propriétaires pour protéger les locataires.
La situation exige une intervention de l’État sur les loyers, pour faire baisser la pression de ceux-ci, seule façon d’aider directement tous les locataires qui connaissent des difficultés dues à la crise sanitaire. Outre le fait qu’il n’est pas prêt à remettre en cause le droit des propriétaires, le gouvernement est empêtré dans la réforme des APL qui a été engagée immédiatement après l’élection de Macron : baisse des APL, ponction sur les fonds des bailleurs (la Réduction de loyer de solidarité — RLS), refonte de son calcul, tout ceci pour faire des économies sur le dos des locataires, des mal-logéEs. Difficile pour lui de revenir dessus sans que ça se voit. Pas d’autres choix pourtant pour faire face à la crise que de bloquer les hausses des loyers, baisser ceux-ci directement ou en augmentant et en élargissant les APL. Cela ne se fera pas sans luttes.