Dans un contexte de remontée du nombre de contaminations et de progression du virus, le gouvernement a annoncé la même semaine l’obligation du masque dans de nombreuses villes et la fin du régime exceptionnel d’absence qui était jusque-là mis en place dans le cadre de l’épidémie pour les personnes dites « les plus à risque ». On notera le sens du timing…
Jusque-là, malgré de nombreuses hésitations et une confusion entretenue par le gouvernement, les travailleurEs « vulnérables » bénéficiaient d’un régime dérogatoire d’absence. Dans le privé, cela leur donnait accès soit au maintien en télétravail lorsque leur activité le permettait, soit à un arrêt de travail dérogatoire durant la période allant du 3 mars au 30 avril, puis par la suite au dispositif de « chômage partiel » mis en place par le gouvernement. Pour les fonctionnaires, ils avaient accès depuis le 3 mars à un placement en télétravail ou en « Autorisation spéciale d’absence » (ASA) qui leur permettait un maintien de leur salaire plein.
Les « vulnérables » de la veille sont pas ceux du lendemain
Étaient alors considérées comme vulnérables : les plus de 65 ans, les personnes atteintes d’une maladie chronique ou fragilisant leur système immunitaire (antécédents cardiovasculaires, diabète, obésité, pathologies chroniques respiratoires, cancers, insuffisance rénale, cirrhose, splénectomie, drépanocytose, etc.) et les femmes enceintes au troisième trimestre. Il faut considérer aussi l’élargissement qui avait été fait de ces régimes aux gardes d’enfants et surtout les conjointEs de patientEs à risque. Un dispositif qui, loin d’être parfait, avait le mérite d’offrir un minimum de protection sanitaire mais surtout légal à une frange des travailleurEs parmi les plus fragiles et les plus précaires.
Sauvegarder « les plus fragiles des vulnérables » (sic)
L’article 2 du dernier décret restreint le régime dérogatoire à quatre critères de vulnérabilité comprenant les cancers, l’immunodépression, le diabète ou obésité avec complications et, pour les plus de 65 ans, les insuffisances rénales sévères (dialyses). Autrement dit, essentiellement des personnes dont l’état de santé très précaire les excluaient déjà très souvent du travail. Pour les autres ? Le risque semble acceptable à ce gouvernement qui a pris l’habitude de jouer avec nos vies…
Comme toujours, cette reprise du travail forcée concerne de manière très différente les « premiers » et les « derniers » de cordée. Dans le privé, le chômage partiel représentait une perte de salaire, mais moins importante que celle impliqué par un arrêt maladie. De même dans le public avec les ASA. Notons enfin, la crise l’a mis au jour, que les travailleurEs ne pouvant télétravailler sont en majorité celles et ceux effectuant les tâches les plus difficiles, les plus manuelles, les moins bien payés et les plus précaires.
Lutter toutes et tous ensemble
En réalité, cette mesure, ne s’appliquant qu’à une minorité de personnes, est en réalité aussi mesquine que symbolique. Elle envoie le signal clair que « tout le monde doit retourner au travail », y compris au prix de sa vie. Ce n’est pas le type de société que nous voulons construire. Nous devons également nous rappeler que les droits et les conditions de travail des plus « fragiliséEs » d’entre nous sont depuis longtemps la mesure des droits de l’ensemble des travailleurEs. Il faut exiger le retrait de ce décret scélérat et imposer, dans chaque entreprise, le maintien du salaire plein sans jours de carences pour tous les salariéEs ne pouvant travailler à cause de l’épidémie.