Publié le Vendredi 24 octobre 2008 à 20h59.

Sifflons Sarkozy !

Le lendemain même du match France-Tunisie où La Marseillaise avait été sifflée, Nicolas Sarkozy et son gouvernement lançaient une offensive mettant à l’index et livrant à la vindicte publique les jeunes des quartiers populaires.

La secrétaire d’État à la Politique de la ville, Fadela Amara entonnait un cri de guerre : « Pas de pitié pour ces gens-là. » Bernard Laporte affirmait : « Plus de match contre l’Algérie, le Maroc, la Tunisie au Stade de France. » Roselyne Bachelot menaçait d’interrompre à l’avenir les matchs où La Marseillaise serait sifflée. La gauche, elle aussi, s’est offusquée : « C’est inadmissible de tolérer ça dans les stades » (Ségolène Royal) ; « Le Premier ministre a eu raison. Oui, il faut arrêter le match. Il faut dire non à des comportements qui mettent à mal l’union nationale, l’identité, la République » (Manuel Valls) ; « Un sentiment de colère et une volonté de condamnation » (Marie-George Buffet).

Nous ne joignons pas nos voix à ce concert indécent, car ces sifflets sont légitimes. Ce que les jeunes ont sifflé, ce sont la politique de discrimination dont ils sont l’objet, l’abandon des quartiers populaires où les promesses ne sont jamais tenues, le harcèlement et les violences des forces de l’ordre à leur égard, les expulsions des sans-papiers.

Le fait qu’aujourd’hui, grâce à Sarkozy, siffler l’hymne national soit passible d’une condamnation est une atteinte à la liberté d’expression la plus élémentaire. Cela s’inscrit dans le cadre d’une logique sécuritaire sans fin.

Le jour du match, l’état-major de la direction centrale de la sécurité publique française présentait ses nouvelles techniques pour faire face à de possibles révoltes dans les quartiers populaires : mobilisations de plusieurs centaines de policiers sur un même lieu, dont une partie en civil, répartition en petits groupes, flash-balls, hélicoptères et drones (petits avions sans pilote), utilisation systématique de la garde à vue de 96 heures. C’est un véritable dispositif d’exception dans les banlieues et les quartiers populaires que le ministère de l’Intérieur est en train de mettre en place.

Et c’est bien contre cette politique-là, et avec les siffleurs, qu’il faut aujourd’hui se mobiliser.