Jusqu’au 24 février, musée des Invalides, Paris 7e.Une exposition formidable dans un lieu improbable et plus qu’un mois pour aller la voir. La BDIC, Bibliothèque de documentation internationale contemporaine, riche de 200 000 documents, dont 1 500 affiches politiques, en expose 150 au musée des Invalides, où elle est implantée. C’est déjà un régal ironique de voir ces extraordinaires traces des diverses révolutions et mouvements de résistance populaire exposés à 5 mètres de l’entrée du musée des Armées, mais une fois l’étonnement passé, l’exposition elle-même procure un vrai moment d’émotion.Des placards de 1789, appels officiels, journaux de rue, manifestes, y compris celui qui conduira Olympe de Gouges à l’échafaud en 1793, en passant par les affiches de l’insurrection de 1830 et celles du gouvernement provisoire de 1848… L’affiche s’affirme comme le moyen de communication rapide et privilégié. Ce qui dit quelque chose aussi des acteurs de ces mouvements à des époques où le « peuple » ne savait pas lire.La guerre de 1870 et la Commune occupent une part importante de l’exposition, une « véritable pluie d’affiches » s’étant abattue sur Paris, outil d’information heure par heure des Communards (395 affiches différentes en deux mois), outil de gouvernement du Comité central de la Garde nationale. Des artistes de l’époque ont utilisé ces documents, dépêches… pour réaliser des tableaux et eaux fortes qui donnent une idée de leur immense variété.Au XXe siècle, les deux guerres donnent également la part belle aux affiches : propagande, communication, résistance aussi par lacération des affiches de l’ennemi, tous les moyens et supports sont utilisés en ces temps de manque de moyens, jusqu’aux étiquettes d’écoliers.Mai 68 couvre les murs des villes, Paris surtout, d’affiches au ton nouveau. Aux thèmes de propagande purement politiques s’ajoutent des slogans plus radicaux ou plus poétiques « Prenez vos désirs pour des réalités » ou les slogans féministes « Une femme sans homme c’est un poisson sans bicyclette ».Le XXIe siècle, celui où les révolutions utilisent Internet, n’a pas vu la mort de l’affiche politique. Bien au contraire, l’irruption du graphisme lui donne une nouvelle jeunesse. Le dessin, la mise en page, les slogans utilisent les moyens et les codes de l’art ou même sont proches des styles utilisés par la publicité, en détournant le langage de façon impertinente et ironique. Catherine Segala