Publié le Dimanche 13 février 2022 à 21h00.

Une perspective globale de la gestion de l'alimentation

Pour transformer l’ensemble du système alimentaire, le changement d’échelle est fondamental. Les choix économiques qui seront faits pour financer la Sécurité sociale de l’alimentation seront déterminants. La proposition qui est faite est d’appliquer la philosophie du régime général à l’alimentation et de continuer le mouvement dans d’autres secteurs avec l’ambition d’une transformation sociale générale.

Une proposition systémique

La création de richesse se matérialise dans le secteur marchand (par les échanges monétaires) mais n’est rendue possible que par le fonctionnement général de la société, y compris par le travail fourni hors du secteur marchand. Généralement, cet important travail hors secteur marchand, comme le travail ménager assuré pour l’essentiel par les femmes, est invisibilisé. C’est la mise en commun (ou socialisation) de la valeur ajoutée produite par le secteur marchand qui permettra l’organisation d’une société débarrassée de l’exploitation d’êtres humains par d’autres.

L’allocation mensuelle via la carte « Sécu alimentation » sera universelle, donc pour toute personne résidant sur le territoire, et non réservée à une certaine catégorie de la population (précarisée, ou bien parce qu’elle cotise via son emploi). Les critères d’exclusion n’ont pas leur place dans ce projet.

Dans un premier temps, la Sécurité sociale de l’alimentation n’empêchera pas la coexistence d’un marché alimentaire capitaliste. Mais avec la nouvelle cotisation sociale « Alimentation », avec les cantines auto-gérées, avec le versement d’une allocation mensuelle ne pouvant être dépensée qu’auprès des entreprises conventionnées, c’est l’ensemble de la filière qui devra se reconfigurer. Mais la « coexistence pacifique » est un leurre, et cela ne peut être un moment qui s’éternise car deux logiques opposées sont en présence. Si nous ne nous battons pas dès le départ pour une proposition systémique qui englobe l’ensemble des secteurs (production/transformation/distribution/consommation), nous risquons de reproduire ce qui se passe dans la santé avec l’industrie pharmaceutique : créer un marché captif pour la grande distribution. Il est essentiel que les salariéEs deviennent les copropriétaires d’usage de leurs magasins, de leurs entreprises, de leurs restaurants et qu’un rapport de force s’engage sur le terrain de la propriété.

Dans leur conclusion, les auteurs du livre Régime général. Pour une sécurité sociale de l’alimentation1, posent une multitude de questions, toutes de grande importance, souhaitant par là même que le débat s’élargisse. C’est un grand chantier politique qui est ouvert dans lequel les anti-capitalistes ont toute leur place.

  • 1. Laura Petersell et Kevin Certenais, Régime général. Pour une sécurité sociale de l’alimentation. Riot Éditions. Voir la présentation au Lieu-Dit (Paris 20e) : https ://www.youtube.com/watch ?v=NGtpZUUnwU4