«Les monstres ça n’existe pas. C’est la société. » C’est par ces mots que s’est exprimée Adèle Haenel, le 4 novembre 2019 dans un live de Mediapart, après avoir dénoncé les multiples agressions sexuelles de Christophe Ruggia à son encontre pendant son adolescence. Deux ans après #MeToo, la question des violences dont les femmes sont victimes reste au cœur du mouvement féministe qui traverse le monde.
« El violador eres tu »
Avec l’irruption du mouvement de masse féministe que nous vivons en ce moment, l’un des acquis est que c’est désormais à une échelle de masse, et non plus au seul niveau d’une poignée de féministes, que les violences subies par les femmes ont été démasquées comme un phénomène structurel, c’est-à-dire lié à la structure de la société. Si autant de femmes sont victimes, c’est que les hommes qui commettent les violences sont nombreux, ou selon l’adage féministe : « L’homme violeur n’est pas un fou, c’est le fils malade du patriarcat ». C’est en cela que rendre visible la violence et dire d’où elle vient, la nommer, est une nécessité. Une nécessité qui permet en outre de sortir de l’acte individuel et de la honte qui nous est imposée par la société.
Si la violence est systémique, c’est qu’elle est utile au système
Si la visibilité et la libération de la parole sont des avancées, en rester à cette seule étape ne servira à rien. Même si des mouvements de masse ont émergé sur cette question, nous en restons encore à une analyse superficielle : celle d’un ancien système profondément ancré qu’on aurait du mal à chasser des mentalités. Ainsi, avec de l’éducation et quelques réformes, on pourrait mener la lutte, comme pour l’alcool au volant et les accidents de la route.
Mais les idées ne flottent pas en l’air, l’idéologie qui domine est là pour servir un système et ce système c’est le capitalisme. La violence sert à maintenir l’ensemble des femmes dans une situation de domination pour permettre la reproduction de la force de travail et, a fortiori, maintenir les femmes prolétaires dans des emplois moins qualifiés, précaires, sous-payés, pour garder une main-d’œuvre plus malléable comme c’est le cas aussi des travailleurEs racisés, en particulier des sans-papiers.
Au cœur du système
Une fois que ce constat est posé, on peut alors se rendre compte que la violence se trouve au cœur même du système capitaliste, comme outil de maintien de la domination et des rapports hiérarchiques qui en découlent. Toute stratégie réformiste est alors vouée à l’échec : qu’elle se focalise sur les rapports inter-individuels de manière prétendument radicale, ou sur la demande de mesures répressives. Pour sortir de ce système de violence, il faut détruire le système qui l’utilise.