Publié le Mercredi 12 juillet 2023 à 10h51.

Pour une jeunesse qui ne se tient pas sage

Le premier semestre de l’année 2023 a été marqué par de fortes mobilisations : contre la réforme des retraites, contre les mégabassines et la guerre de l’eau et, plus récemment, en réponse au meurtre de Nahel, 17 ans, abattu à bout portant par un policier. Mobilisations auxquelles le gouvernement n’a répondu que par la répression et l’autoritarisme.

Àchacune de ces échéances et avec une certaine détermination, la jeunesse a répondu présente. En parallèle, le gouvernement continue sa politique de casse sociale et notamment de casse du service public d’éducation. La politique antijeune de Macron, tout comme la répression des mobilisations auxquelles les jeunes participent ou sont à l’initiative, démontrent en réalité une politique violente et paternaliste envers une jeunesse considérée comme une variable d’ajustement du système, incapable de penser par elle-même et qui par-dessus tout, doit se tenir sage.

Dans la continuité de la mandature précédente et avec un certain saut qualitatif, l’agenda du gouvernement s’est accéléré depuis la réélection de Macron en avril 2022. S’enchaînent depuis lors réformes régressives, amendements sécuritaires, lois racistes, projets inutiles et polluants, etc. Dans le même temps et pour faire taire le mouvement social, une répression quasi-inédite en France a été exercée par le gouvernement et sa police. Face à cela, la jeunesse, porteuse de plus de radicalité, a pris part à toutes les luttes.

Répression du mouvement social et écologiste

Alors que la mobilisation contre la réforme des retraites était trans-générationnelle, ce sont principalement des jeunes manifestantEs qui ont été prisEs à partie par la police. Interpellations arbitraires, ciblage, matraquages, humiliations, gazages. La volonté de mettre la jeunesse au pas s’est particulièrement illustrée, notamment après le 49.3 et les manifestations nocturnes, grandement composées de jeunes, comme à Lille ou à Paris. 

Cette forme de mobilisation, plus radicale que les manifestations de l’intersyndicale, a posé la question de la confrontation directe avec l’État et sa police. Cette dimension de confrontation reflète une profonde détermination dans la jeunesse, alimentée par un avenir incertain et marqué par la précarité et la crise climatique.

Mais encore, comme on le voit depuis les grèves pour le climat, la jeunesse est à l’avant-garde des mobilisations écologistes. Cette année, la lutte écologiste radicale s’est massifiée et ce sont par exemple 30 000 personnes, dont beaucoup de jeunes, qui ont participé à la manifestation à Sainte-Soline, avec une dimension d’affrontement plus claire face aux criminels climatiques et de sabotage des projets destructeurs. Défendre notre avenir sur une planète vivable, c’est devoir s’affronter à une violence innommable : 7 hélicoptères, tirs de grenades, policiers en quad tirant des LBD, plus de 200 de blesséEs dont certainEs dans le coma, un accès aux secours empêché…

Répression des quartiers populaires

Aujourd’hui la police française est considérée comme la plus violente des polices des États de l’Union européenne. Ancré dans les quartiers populaires depuis des années, le caractère raciste de la police s’est à nouveau illustré le 27 juin à Nanterre où un policier a abattu Nahel, un jeune homme de 17 ans suite à un « refus d’obtempérer ». En 2022, 13 personnes ont été assassinées par la police dans des conditions similaires. Nous pensons également à Alhoussein Camaral, jeune de 19 ans tué lors d’un contrôle routier à Angoulême. Ce sont pour la plupart de jeunes hommes, racisés, issus des ­quartiers populaires.

À la suite de ce meurtre, des révoltes ont éclaté partout en France. Comme en 2005 à la suite de la mort de Zyed et Bouna, la jeunesse des quartiers populaires s’est soulevée. Elle a été réprimée avec une intensité rare, voire inédite. L’intervention du RAID et de la BRI en sont le marqueur : ces corps de police ne sont pas formés au « maintien de l’ordre », mais à la lutte contre le terrorisme et le « grand-banditisme ». 3 200 personnes ont été interpellées, âgées en moyenne de 23 ans. Le bilan, de fait, s’alourdit : un jeune homme de 27 ans assassiné à Marseille, et un autre entre la vie et la mort à Mont-Saint-Martin. Face au refus de compter les morts, la réponse de l’État est celle de l’escalade répressive.

Ces révoltes surviennent évidemment à la suite des meurtres et de leur caractère éminemment raciste mais elles font également suite au racisme et aux discriminations quotidiennes, à des années d’abandon des quartiers populaires et au délitement, voire à la suppression des services publics par l’État, traduisant la considération des gouvernements successifs à leur égard : « des citoyenEs de seconde zone ».

Non, la jeunesse ne se tiendra pas sage

Cette politique répressive cache aussi une politique paternaliste envers les jeunes. Sommes-nous incapables de penser, réfléchir et décider par nous-mêmes ?

Nous pouvons comprendre le continuum des politiques antijeunes de Macron et son monde, nous ressentons les injustices et les violences du système, nous avons des propositions pour notre avenir.

Pourtant, les mobilisations de jeunesse sont systématiquement moquées, méprisées : « ça te passera avec l’âge ! »

Au-delà, l’État choisit de nous criminaliser. Nous violenter, interpeller, brutaliser, casser nos révoltes ou nos blocages d’université, couper nos cortèges jeunes. C’est ignorer notre parole, notre colère, c’est vouloir l’enfouir. FuturEs travailleurEs, le capitalisme a besoin de nous et de notre obéissance, comme le montre la déclaration du préfet de l’Hérault : « Deux claques et au lit ». En plus d’accuser les familles d’être responsables de la violence du système, ce dernier propose la violence éducative.

Alors non, la jeunesse ne se tiendra pas sage. Au contraire, soyons l’étincelle qui détruira le système.