Publié le Vendredi 7 mai 2010 à 14h50.

En première ligne pour le mal-logement  !

Touchés de pein fouet par le chômage les habitants des quartiers populaires sont également plus concernés que les autres par les difficultés liées au logement.le mal-logement concerne près d’un habitant sur six en France1. Cette situation dramatique est le résultat des politiques menées par les gouvernements de droite, comme ceux dits de gauche, qui depuis plus de 40 ans n’ont pas construit à la hauteur des besoins de la population. Dans les quartiers populaires, la question du mal-logement est bien évidemment plus forte qu’ailleurs. Il prend des formes diverses : insalubrité, surpeuplement, loyers exorbitants… Avec la crise économique et la montée du chômage, la très grande majorité des habitants des quartiers populaires se retrouve en difficulté pour accéder à un logement décent ou pour payer loyer, charges, eau, électricité, tout cela en hausse importante.

L’accès au logement : le parcours du combattant !

En 2008, 1 867 901 demandes de logement social étaient enregistrées. Dans le parc privé, il faut gagner le double voire le triple du prix du loyer et avoir de solides garants pour espérer obtenir un logement. Alors avec la montée du chômage, le développement de l’intérim et des temps partiels, nombreux sont ceux qui ne peuvent prétendre à un logement dans le parc privé, et doivent attendre des années avant d’obtenir un logement social. Les jeunes sont les premières victimes de cette hausse des loyers qui rend difficile l’accès au logement, et pour les jeunes des quartiers populaires s’ajoute à cela une discrimination au lieu d’habitation ou à l’origine. Ainsi une étude de la Halde de 2006 concluait qu’un Maghrébin a 1,75 fois moins de chance d’avoir une réponse positive dans le parc privé qu’un blanc, et « le candidat d’origine noire africaine a 2,5 fois moins de chances d’obtenir une réponse positive que le candidat de référence »2. Une véritable ségrégation spatiale qui fait que lorsque l’on vient d’un quartier populaire et que l’on n’a pas la tête d’un « candidat de référence » on doit se loger dans un quartier populaire !

Les expulsions

Accéder à un logement ne met pas à l’abri des problèmes. En effet, le budget que consacrent les ménages pour se loger ne cesse de croître, et il se situe désormais loin devant l’alimentation (respectivement 25 % et 13 %)3, alors que la situation était inverse au début des années quatre-vingt. De nombreux locataires se retrouvent dans l’impossibilité de payer leur loyer et avec la fin de la « trêve » hivernale, c’est la saison des expulsions qui commence. Chaque année, plus de 100 000 ménages sont jetés à la rue, et l’on peut s’attendre à une hausse importante de ce chiffre en 2010, alors que près d’un demi-million de travailleurs sans emploi vont se retrouver sans indemnités.   38 000 expulsions prévues dans les prochaines semaines, selon la Fondation Abbé-Pierre ! Dans une même agglomération, le taux de chômage est deux fois plus élevé dans les ZUS, et les jeunes hommes sont beaucoup plus touchés avec plus de   40 % de chômage chez les 15-24 ans, 29,6 % pour les filles de la même tranche d’âge4. Alors là encore, dans les expulsions, les habitant-e-s des quartiers populaires sont en première ligne, sont les premières victimes de ce droit moyenâgeux.

Des quartiers « rénovés » ?

Les démolitions dans le cadre des projets Anru, censés « réaménager » les quartiers populaires, aggravent la situation. Un peu partout fleurissent dans des quartiers populaires des projets Anru, les bulldozers entrent en action et démolissent des tours bien souvent en bon état. Les logements construits en remplacement ne correspondent pas aux besoins des populations car ils sont en général plus chers et plus petits. Là encore, le mécanisme de la ségrégation spatiale est à l’œuvre puisque les F5 disparaissent et les familles nombreuses sont contraintes de quitter le quartier pour se reloger toujours plus loin du centre de   l’agglomération.

Isabelle Guichard et Maxime Besselièvre

1. Rapport sur le mal-logement 2010 de la Fondation Abbé Pierre (FAP)

2. Étude – testing La discrimination dans l’accès au logement locatif prive. Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. Mai 2006

3. Rapport sur le mal-logement 2010 de la FAP, chapitre

4. Observatoire des inégalités, « le chômage dans les quartiers dits sensibles », article du 12 janvier 2010.