Publié le Dimanche 30 janvier 2011 à 22h29.

Travailler toutes et tous pour travailler mieux et moins …

Nous devons faire du droit à l’emploi une question politique centrale, un choix de société. Nous devons imposer le droit pour chacunE d’avoir un emploi stable et bien payé, un revenu régulier toute sa vie.

Contre le chômage et la précarité, le problème qui se pose est bien celui d’un véritable partage du temps de travail qui, bien entendu, ne peut être séparé du partage des richesses. Pour permettre à chacunE de vivre au moins correctement. Dans une société où tout s’achète et se vend (même la santé), le problème du revenu est vital. Et le revenu, directement ou pas, est lié au travail : salaire direct ou salaire socialisé.

Il faut donc réduire le temps de travail jusqu’à l’abolition du chômage. Le temps passé à travailler serait ainsi beaucoup moins long et contraignant pour chacunE. Parce que le travail imposé n’est pas un but dans la vie, ni un plaisir ni une activité épanouissante, il doit prendre le moins de temps de notre vie. Alors, « Travailler tous pour travailler moins » paraît être un mot d’ordre très juste et clair sur le sujet ! Et chacunE pourrait au moins vivre décemment sur le plan matériel et il n’y aurait plus cette menace du chômage et de la précarité qui empoisonne la vie.

Le partage du temps de travail est vraiment crucial : pour les privéEs d’emplois comme pour les salariéEs précaires et l’ensemble des salariéEs. Et n’oublions pas non plus la masse de salaire socialisé que représenteraient des millions de cotisations sociales supplémentaires pour toutes les caisses. On voit comment le gouvernement se sert des déficits des caisses pour justifier et présenter comme nécessaires ses attaques sur les retraites, la santé…

Le travail, base du fonctionnement de la société...

Parler du « travail » ne signifie pas en faire l’apologie ou lui donner on ne sait quelle valeur morale. Mais le travail est une nécessité pour faire fonctionner la société. Il a une place prépondérante que cela nous plaise ou pas. Pour se nourrir, se loger, se vêtir, se soigner, se distraire… il y a de l’activité humaine, du temps passé, donc du travail. C’est une réalité toute simple. C’est le travail qui crée la richesse distribuée et permet à la société de fonctionner. Il y a, bien sûr, des travaux qui épanouissent et d’autres qui sont plus des corvées parfois très dures et désagréables qu’il faut accomplir. Il est certes plus enrichissant de soigner une personne malade ou faire du pain que de ramasser les ordures dans la rue ou de faire les 3x8 à l’usine ! Une véritable alternative, solidaire et juste, passe bien entendu par le partage aussi de ce qui n’est pas forcément agréable mais tout de même nécessaire.

Il faut rendre moins durs les travaux les plus ingrats, les plus pénibles, les transformer, voire en supprimer aussi. Et faire tout pour soulager les salariéEs qui les réalisent. Il existe et il existera encore plus dans l’avenir des possibilités de réduire beaucoup les souffrances liées au travail. Se battre pour le droit au travail ne doit pas signifier accepter tous les travaux à n’importe quelles conditions. On ne peut rêver et imaginer sa vie à faire les 3x8 à l’usine… Le travail sera vraiment attractif quand il permettra de bien vivre et que son utilité sociale sera seule prise en compte et non le profit des gens qui nous exploitent.

Et puis, il n’est pas acceptable que d’un côté de plus en plus de travailleurs doivent se contenter au mieux de petits boulots mal payés ou de pas de boulot du tout, pendant que d’autres perdent leur vie à la gagner, comme on disait en 1968, et à qui on dit de faire des heures supplémentaires et de travailler plus longtemps pour avoir droit à la retraite !

Oui, il y a urgence à réduire le temps, l’intensité et les cadences du travail. Travailler moins pour travailler tous et toutes. Travailler moins pour avoir du temps libre pour vivre.

Notre projet de société est clair : déterminer collectivement et démocratiquement ce qui doit être produit pour satisfaire nos besoins et, de là, partager le temps de travail nécessaire à cette production. La question de l’emploi est évidemment centrale dans notre projet de transformation sociale. Il faut privilégier la création d’emplois socialement et écologiquement utiles fondés sur la satisfaction des besoins sociaux, notamment dans les services publics.

Combattre les idées reçues sur le travail...

L’idée qu’il n’y a pas ou plus de travail pour tous et toutes finit par être reprise même parmi des militantEs du monde ouvrier. De même, il ne serait pas possible de réclamer un revenu minimum au niveau du Smic sans travailler. Mais tout dépend comment on raisonne : l’emploi par rapport au système de production capitaliste et ses critères de rentabilité ou l’emploi par rapport aux besoins et nécessités de la société.

Il y a bien des besoins non satisfaits qui pourraient susciter des créations d’emplois : le seul problème c’est qu’ils ne sont pas porteurs d’une rentabilité suffisante selon les critères capitalistes. Alors que l’emploi ne devrait pas être considéré en fonction de la réalisation de profits mais selon son utilité, sa nécessité sociale. Renoncer au plein-emploi serait un renoncement au rééquilibrage du partage de la valeur ajoutée entre salaires et profits et accepter la fracture entre ceux et celles qui peuvent s’insérer dans la vie sociale (y compris le travail) et ceux et celles qui n’auraient qu’à se satisfaire d’un revenu d’assistance en étant privés de l’un des moyens essentiels d’intégration à la collectivité qu’est le travail.

Il serait donc illusoire de prétendre lutter vraiment contre le chômage sans s’en prendre aux profits financiers. Sans remettre en cause leur règle du jeu. Un projet de transformation sociale implique forcément un affrontement avec les bénéficiaires de l’ordre existant qui s’en feront et s’en font déjà les défenseurs acharnés. Il faudra remettre en cause le droit des patrons à être maîtres dans leur entreprise et donc de l’emploi de ceux et celles qui y travaillent. Pour imposer le droit à l’emploi, il faudra d’abord interdire le droit de licencier, ce droit d’un autre âge qui donne le pouvoir de vie et de mort sociales sur les individus. L’interdiction des licenciements est en fait une revendication très politique : elle préfigure une autre société. On ne peut réellement défendre l’emploi sans remettre en cause la logique capitaliste qui défend des intérêts inverses aux nôtres. Satisfaire également les actionnaires et les salariés c’est de l’utopie ou du social-libéralisme !

Jacques.