Au musée des Arts décoratifs de Paris, jusqu’au 4 septembre 2016.
Hier et aujourd’hui, le rôle de la caricature dans la société est le fruit d’une longue histoire, ce que montre cette exposition présentant la relation entre caricature et affiche de la seconde moitié du 19e siècle au début du 20e. Une période importante où l’affiche, en particulier publicitaire, connaît un développement important en se professionnalisant, au moment même où l’industrialisation de la presse engendre une prolifération de publications parmi lesquelles les journaux satiriques : Le Charivari, La Silhouette, La Caricature, puis Le Rire, Le Journal pour rire, L’Assiette au beurre, et bien d’autres… Comme le montre cette exposition, les deux histoires sont donc intimement liées.
Les caricaturistes font vendre. Tout au long du 19e siècle, suivant les régimes politiques, ils affrontent, et se jouent de la censure. Aussi, lorsque les lois sur la libéralisation de la presse et de l’affichage sont votées en 1881 – dans un contexte marqué par les nombreux scandales de la 3e République, l’affaire Dreyfus, l’anticléricalisme, la critique radicale de la société capitaliste par le mouvement ouvrier... – le nombre des caricatures explosent. Dès lors, le succès de ces dessins de presse deviennent de véritables arguments publicitaires, et vont bien vite s’afficher sur les murs des villes, les quais des métros et les gares...
La caricature a donc joué un rôle central dans le renouvellement de l’affiche : en grossissant le trait, la caricature permet un véritable bond qualitatif, un pas certain vers une modernité graphique, comme le montre cette exposition alignant en quelques salles affiches politiques et sociales (de l’anticléricalisme... à l’antisémitisme...) ou publicitaires. Le but n’est donc pas obligatoirement de faire rire mais surtout de marquer les esprits, de capter l’attention. Un exercice dans lequel excellent Adrien Barrère, Henri Jossot, Jean-Louis Forain, Charles Léandre, Léonetto Capiello, Sem ou O’Galop, dont de beaux travaux sont ici présentés.
Plaisir des yeux et de la tête.
Manu Bichindaritz