Jusqu’au 14 août au centre Pompidou (Paris).
Une rétrospective a lieu sur ce photographe américain, auteur essentiel du 20e siècle (1903-1975). Plus de 300 photographies et objets collectionnés par l’auteur sont regroupés pour la première fois dans un musée français. Walker Evans est connu d’un large public pour son travail sur les fermiers ruinés par la crise des années 1930. Tout le monde a vu ces portraits de femmes fatiguées par la misère qui regardent le photographe.
Mais plus fondamentalement, le travail de Walker Evans marque une rupture avec la photographie qui le précède, la photographie d’art, le pictorialisme (Alfred Stieglitz). Finis les paysages urbains enveloppés de fumée, finie la photo qui imite la peinture impressionniste. Il montre le réel : les maisons, la rue, les enseignes publicitaires, les fils électriques, les déchets, les outils... Il revendique lui-même son intérêt pour le vernaculaire, les objets du quotidien qui ne font pas partie du monde de la culture. Les maisons victoriennes de Boston sont photographiées de face, à la chambre, en plein soleil pour obtenir un maximum de détails, le photographe disparaissant derrière son image pour viser une sorte d’objectivité presque documentaire.
C’est avec cet état d’esprit qu’il s’engage en 1935 dans la section photographique de la Farm Security Administration, avec de nombreux autres photographes telle Dorothea Lange. L’administration Roosevelt a besoin d’images pour convaincre son opinion publique d’accepter le New Deal et d’adopter un programme de subventions aux petits paysans ruinés par la sécheresse et la Dépression. Pendant plusieurs semaines, il vit avec trois familles de métayers de l’Alabama et partage leur quotidien au point que la police du comté s’inquiète de cette présence suspecte. Les photographies qu’il en rapporte deviendront les images de référence de la crise, à la fois documentaires, de propagande et finalement objets d’art.
Cette exposition unique permet de découvrir cet auteur dans toute sa complexité de façon très complète. Une occasion à ne pas manquer.
Jean-Marc Bourquin