Exposition au musée du Quai Branly (Paris 7e), du 28 mai au 29 septembre 2019 ; ouvert de 11 h à 19 h (21 h le jeudi, vendredi et samedi) ; fermeture le lundi.
Le musée du Quai Branly présente actuellement le premier volet d’une exposition sur Félix Fénéon (1861-1944), singulier collectionneur d’art à la rencontre de deux siècles (19e et 20e), critique d’art, découvreur d’artistes, galeriste mais aussi journaliste, critique littéraire, éditeur et militant anarchiste.
Collectionner et militer
C’est avant tout la position d’un homme dans son époque que reflètent les œuvres d’art rassemblées ici. La collection de Félix Fénéon – de Degas à Max Ernst en passant par les arts africains – dénote ses idées libérales, très ouvertes au monde.
Figure visionnaire pour ses contemporains, tels Jean Paulhan et Guillaume Apollinaire, qui témoignent de la finesse de sa plume, Félix Fénéon est un employé bien noté du ministère de la Guerre rédigeant, toutefois, pléthore de textes pour des revues anarchistes.
C’est en 1894, dans un contexte de militantisme anarchiste fort et violent, qu’il sera suspecté d’avoir participé à un attentat, arrêté, jugé, puis acquitté grâce à sa personnalité et son sens de la répartie lors du procès. Collectionneur sans fortune, Fénéon découvre des artistes néo-impressionnistes comme Seurat, Signac et Pissaro. Introduisant les arts africains, il sert un nouveau modèle esthétique mettant en parallèle l’art moderne et les arts lointains, l’art et la littérature. Anticolonialiste, sa vision de l’histoire de l’art sort des positions géographiques et témoigne d’un engagement sur les questions d’immigration. Auteur du texte « Seront-ils admis au Louvre ? Enquête sur les arts lointains » publié en 1920 dans le Bulletin de la vie artistique, Félix Fénéon œuvre pour leur reconnaissance.
Estimant sa collection comme son vrai portrait, il la disperse à la fin de sa vie pour ne plus exister, effacer toute trace, et aussi par méfiance vis-à-vis des institutions, préférant que ses œuvres évoluent dans un milieu vivant.
Une collection éclectique
La présence de multiples statuaires, masques, objets africains – série d’impressionnants étriers de poulie sculptés (Congo), masque-heaume Janus (Congo), statue Fang Mabéa (Cameroun) – est ponctuée de tableaux de Bonnard, Lucie Cousturier, Seurat – ses magnifiques Poseuses –, Max Ernst…
Si cette exposition se penche davantage sur la deuxième partie de la vie de Fénéon et sa collection des arts lointains, l’impatience nous tient de découvrir le deuxième volet, Félix Fénéon, les temps nouveaux de Seurat à Matisse, plus axé sur sa position d’avant-garde et ses dimensions politiques, qui se tiendra au musée de l’Orangerie du 16 octobre 2019 au 27 janvier 2020, avant de s’envoler outre-Atlantique pour s’exposer au MoMA de New York.
Julie Dudragne