Jusqu’au 31 juillet 2017 au Grand-Palais (Paris).
Dès l’entrée, le choc entre le Penseur de Rodin et l’homme bleu de Georg Baselitz. Le ton est donné : plus qu’une simple rétrospective, cette belle exposition montre la bascule dans la modernité expressionniste, et l’onde de choc Rodin jusque dans l’art contemporain.
Elle donne à voir comment Rodin a redonné vie à la sculpture par une quête obstinée de l’expressivité : des formes fortes et pures, des mouvements sensuels, des sculptures non finies à la manière de Michel-Ange. Comment il passe de la sensibilité du plâtre sans cesse retravaillé à l’assemblage monumental comme dans la Porte de l’Enfer, véritable catalogue de formes (le Penseur, le Baiser, les Trois ombres ) qui seront individualisées et déclinées, voire amputées et recomposées de façon étonnemment moderne. Comment il supprime le talent en engonçant Balzac dans sa robe de chambre, pour atteindre l’essentiel en frôlant l’abstraction...
Et surtout, elle met en scène en permanence une confrontation jubilatoire, d’abord avec ses jeunes contemporains, Bourdelle, Lehmbruck, Brancusi, Zadkine, en évitant celle, rabâchée, avec Camille Claudel (il faut aller au nouveau musée de Nogent-sur-Seine pour cela), puis avec les maîtres modernes, Matisse, Picasso, Giacometti. Avec, enfin, dans une dernière salle passionnante, la sculpture contemporaine expressionniste de 1945 à nos jours : Germaine Richier, Per Kirkeby, jusqu’à Markus Lüpertz ou encore L’homme qui marche de Thomas Houseago.
Expo dans l’expo, les rares dessins de son exposition de Prague, les Noirs, des dessins de sculpteur à l’encre et gouache blanche, aux forts contrastes de lumières, et les aquarelles érotiques évanescentes quasi abstraites.
Un très bel hommage à Rodin, père de la sculpture moderne. Une exposition ambitieuse.
Ugo Clerico