Film américain, 1 h 44 min, sortie le 26 juillet en France.
Sabotage, c’est l’histoire d’un groupe de jeunes activistes et militants aux parcours divers qui décident de passer à l’action concrète et de saboter un pipeline au Texas. D’après le livre d’Andreas Malm Comment saboter un pipeline, le film est évidemment une illustration des constats formulés et des thèses défendues par Malm dans son essai, plutôt qu’une adaptation. Le préciser sur l’affiche permet aux auteurEs du film d’annoncer la couleur quant au parti pris.
CertainEs y verront une apologie du terrorisme, d’autres y verront un enthousiasmant manuel de militantisme. Le débat n’est pas de savoir s’il faut passer à l’action, mais plutôt comment.
Le film ne discute jamais le choix de l’action radicale ni sa légitimité, mais oriente la discussion sur les débats de stratégie et de mode opératoire, évoquant ainsi la question centrale de la convergence.
Film de braquage et travail collectif
Filmé et monté selon les codes du film de braquage avec des flashbacks rythmant les traditionnelles séquences du genre : préparation de l’action, repérage des lieux, action en temps réel etc., Sabotage est un entremêlement narratif qui donne à voir les différents aspects du désastre causé par l’industrie pétrolière et décrit les motivations individuelles de chacun des personnages : vengeance, résistance, désespoir ou tout simplement convictions, avant de les faire converger dans une action collective. Et c’est justement cette forme narrative et la mise en scène du travail d’équipe, qui permet au réalisateur de développer cette idée de convergence et de donner corps au fond politique.
Entre le jeune amérindien dont les terres sont spoliées par une exploitation pétrolière et une jeune étudiante atteinte d’un cancer causé par la pollution d’une raffinerie, le film confronte avec violence l’impuissance totale des personnages et de leurs actions face à une situation désespérée figurée par des décors sombres et oppressants. Cependant, le choix d’une réalisation immersive permet l’empathie du spectateur et donne un caractère optimiste au film, car l’action collective du sabotage apparaît, elle, comme une forme d’espoir. Filmés sous le ciel bleu des grands espaces américains, les personnages ne sont plus isolés dans l’étroitesse d’une chambre, ni écrasés par l’ombre des cheminées d’une raffinerie ou séparés par des écrans de téléphone ou d’ordinateur. Ils sont ensemble et les mouvements de caméra passent de l’un à l’autre lors de la confection d’une bombe ou de la mise en œuvre de leur plan.
Optimisme de la lutte
Cet attachement aux personnages et la joie ressentie lors de leurs succès est peut-être le véritable propos politique du film. Il est vrai que le cinéma engagé nous a plutôt habitués aux histoires tragiques et aux luttes sans issue. Au contraire, Sabotage sort du défaitisme militant pour proposer une vision optimiste de la lutte. La culture populaire pourra-t-elle redonner espoir à toutEs les miltantEs ? En tous cas Sabotage fait brillamment la démonstration que l’art et la fiction ont un rôle à jouer et qu’un thriller tendu peut aussi être un tract politique très efficace.
La preuve ? Aux USA, la sécurité a été renforcée autour de certaines installations pétrolières à la sortie du film, après que le FBI a alerté sur la possibilité de l’influence du film sur les pratiques militantes. Pas mal pour un film à tout petit budget tourné en trois semaines !