Publié le Jeudi 30 avril 2015 à 22h25.

Le facteur vietnamien

La géopolitique mondiale d’après 1949 (victoire de la révolution chinoise) et 1954 (défaite française) fait du Vietnam le « point focal » de la situation internationale.

C’est la « tranchée avancée » du combat révolutionnaire, pour reprendre les termes d’un long slogan scandé lors des manifestations de solidarité : « salut à vous, frères vietnamiens, soldats de toute première ligne ». Encore faut-il que le mouvement de libération soit à même de porter dans ce pays une très lourde charge : être en « première ligne » face aux États-Unis.

Les luttes anticoloniales au Vietnam n’ont pas pris précocement l’ampleur spectaculaire de ce qui s’était passé dès les années 1920 en Chine. Pourtant, le mouvement national et, singulièrement le PCV, sont contemporains du PCC. Le noyau dirigeant initial de ces deux partis s’est formé dans la foulée de la révolution russe, avant la stalinisation de l’URSS. Tous deux se sont néanmoins identifiés au « camp socialiste », bien que maintenant une autonomie de décision contrastant avec la subordination directe d’autres partis communistes. Tous deux ont aussi accumulé une expérience de lutte variée avant de s’engager dans une guerre populaire prolongée : dès le tournant des années 1930 en Chine, une décennie plus tard au Vietnam.

Vers une nouvelle période

Avant la guerre américaine, le Vietminh acquiert une légitimité nationale profonde avec la proclamation de l’indépendance en août 1945, puis avec la conduite d’une « guerre du peuple » qui inflige au corps expéditionnaire français la défaite de Diên Biên Phu, un exploit déjà sans précédent face à une métropole coloniale. Les États-Unis s’attaquent donc à un adversaire aguerri et enraciné, même s’ils ne doutent pas de la victoire tant ils sont conscients de leur puissance.

De par sa durée, la lutte de libération au Vietnam incarne toute une période ouverte par la révolution russe. La victoire de 1975 en est en quelque sorte le point d’orgue : elle l’emporte dans un conflit frontal avec l’impérialisme étatsunien. Mais bien que cela ne soit pas immédiatement évident, elle annonce aussi la fin de cette période, du fait de la violence des conflits interbureaucratiques et des crises qui rongent les régimes soviétique et chinois.