Témoignage. Une marche pour la liberté des prisonniers politiques sahraouis a eu lieu ce printemps, malgré la répression des autorités marocaines avec la complicité de l’État français. Témoignage d’un de nos camarades du comité catalan.
Partie d’Ivry le 30 mars, la marche est arrivée à Algésiras le 31 mai. Une vingtaine de marcheurs ont embarqué sur un ferry espagnol, direction Tanger. Surprise : des dizaines de policiers marocains sont présents sur le bateau. Dans un port et sur un bateau espagnol, la police marocaine intimide, photographie, bouscule une photographe de la marche. À Tanger, la police empêche les marcheurs de descendre du bateau.
Retour à Algésiras où une conférence de presse est organisée pour dénoncer la complicité des États français et espagnol avec le Royaume marocain, qui occupe illégalement le Sahara occidental, et laisse agir la police marocaine sur son sol en toute impunité. À chaque étape de la marche en France, l’ambassade et les consulats marocains ont mobilisé leurs sbires pour intimider, agresser les marcheurs.
Une marche qui dérange
Claude Mangin, habitante d’Ivry, est mariée avec Naâma Asfari, militant sahraoui emprisonné depuis 2010 dans la sinistre prison de Kénitra au Maroc. Comme des dizaines d’autres militantEs, Naâma a été arrêté lors du démantèlement par l’armée d’un campement pacifiste. En 2010, en écho au Printemps arabe, à l’initiative de jeunes SahraouiEs, des dizaines de milliers de personnes installent un campement dans la zone occupée, revendiquant le respect des droits du peuple sahraoui et la libération des prisonnierEs politiques.
Sánchez, Premier ministre espagnol, et Macron ont affirmé ces dernières années, en contradiction avec les résolutions de l’ONU et du droit international, la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. En France, les projets de coopération avec les autorités d’occupation se multiplient (ville de Montpellier, région Occitanie...), passant outre les arrêts de la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne).
Pour briser le silence sur la situation des prisonniers politiques et du peuple sahraoui, Claire Mangin et l’association des Amis de la RASD (République arabe sahraouie démocratique), avec le soutien de la ville d’Ivry (dont Naâma est citoyen d’honneur), ont pris l’initiative de la marche.
Dans chaque ville-étape, des collectifs ont organisé l’accueil et pris des initiatives (projection de films, expositions, meetings, manifestations...). À chaque étape, des hommes de main des consulats marocains ont organisé des agressions contre les marcheurs, tentant d’interdire par la force la tenue des évènements programmés.
Perpignan, le comité catalan de soutien à la marche
À l’initiative de membres des Amis de la RASD, un large collectif s’est constitué pour organiser l’accueil de la marche. De 200 à 300 personnes ont participé aux différentes initiatives : repas partagés, projection de film, atelier d’écriture de lettres aux prisonniers. Le collectif a invité Daniel Wéa, président du Mouvement des Kanak en France. Daniel a rappelé les liens de solidarité historique qui unissent les deux peuples, confrontés à une colonisation de peuplement et au refus commun de la France et du Maroc de respecter le droit international.
Carole Delga et la région Occitanie, complices du Royaume
En même temps que la marche traversait la région, Carole Delga, présidente PS de la région Occitanie, recevait en grande pompe à Port-la-Nouvelle les autorités d’occupation marocaines pour annoncer la prochaine signature d’une convention de coopération économique entre les ports de Port-la-Nouvelle et de Dakhla au Sahara occidental. La construction du port de commerce de Dakhla est illégale. Il est l’outil du Royaume pour exporter les richesses pillées au peuple sahraoui.
C’est pourquoi une délégation du comité catalan s’est rendue à Algésiras pour dire sa solidarité avec les prisonniers politiques et affirmer son engagement à mettre en échec tout projet de coopération avec les autorités d’occupation. L’ensemble des partis qui composent le NFP (Nouveau Front populaire) demande le respect des résolutions de l’ONU et du droit international par le Maroc. Ils doivent s’opposer à ces projets. Les éluEs PCF se sont prononcéEs dans ce sens.
Le travail ne fait que commencer. Sur le terrain juridique, dans les institutions, dans les entreprises concernées par les projets, avec les Écologistes (les projets de développement industriel du Maroc menacent gravement les équilibres écologiques), dans la rue, avec les Amis de la RASD et du Front Polisario, nous mettrons en échec Delga et ses projets colonialistes. Le NPA-l’Anticapitaliste doit prendre toute sa place dans cette mobilisation.
Retrouvez toutes les infos sur le site des Amis de la RASD
HISTORIQUE
En 1973, le peuple sahraoui s’organise au sein du Front Polisario pour engager la lutte armée contre la colonisation et l’occupation espagnole. L’Espagne se retire, et la CIJ (Cour internationale de justice) reconnaît le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. En réponse, le roi du Maroc envoie l’armée, accompagnée par des centaines de milliers de civils (la Marche verte), occuper le Sahara.
En 1976, le peuple sahraoui proclame la République arabe sahraouie démocratique (RASD), qui est reconnue par la Mauritanie (qui se retire de la partie du Sahara occidental qu’elle occupe). Le Polisario résiste militairement à l’occupation et aux forces armées marocaines. Peuple de quelques centaines de milliers de personnes, les SahraouiEs ne peuvent vaincre militairement une armée marocaine fournie et conseillée par l’impérialisme, l’État français en tête.
En 1991, un cessez-le-feu est signé. Le Maroc s’engage à organiser un référendum d’autodétermination. Le Maroc ne respecte pas l’accord. Un mur de milliers de kilomètres, où des millions de mines antipersonnelles sont posées, coupe le Sahara en deux. Le Maroc occupe la zone côtière où se concentrent les richesses et la population. Deux cent mille SahraouiEs vivent dans des camps de réfugiéEs dans le sud algérien.
Par les armes, les mobilisations pacifistes, les actions de désobéissance civile, dans les camps de réfugiéEs, dans la zone occupée, dans la diaspora en France et en Espagne, le peuple sahraoui résiste. La répression et l’arbitraire sont la réponse du Royaume. Des dizaines de prisonniers politiques sahraouiEs croupissent en prison pour le simple fait d’être SahraouiEs et d’avoir revendiqué pacifiquement leurs droits.
En France, depuis 1976, l’association des Amis de la RASD organise la solidarité aux côtés de la diaspora sahraouie et des représentantEs du Front Polisario.