Le 8 octobre dernier les syndicats du CHU de Toulouse ont appris qu’un interne en radiologie, N.W., était affecté dans l’établissement à compter du 4 novembre, malgré sa condamnation en mars dernier à cinq ans de prison avec sursis pour plusieurs agressions sexuelles.
Le parcours de cet étudiant en médecine est particulièrement sordide ; les défaillances des institutions le sont également. En 2020, plusieurs étudiantes ont dénoncé des faits d’agressions sexuelles et de viols auprès de l’université de Tours. Immédiatement, le doyen de l’université avait tout fait pour minimiser les faits et pour que rien ne soit mis en œuvre contre cet étudiant. Et ce, malgré des dépôts de plaintes et une détention provisoire de près de deux mois à la fin de l’année 2020. À la suite d’un « arrangement » cet étudiant est parti poursuivre ses études à l’université de Limoges où il a débuté en septembre par un stage en… gynécologie !
Un premier procès
Son procès s’est tenu en février 2022, après l’accord de plusieurs victimes sur une requalification des faits de viols en agressions sexuelles, pour qu’il soit jugé plus vite, condamné, et donc pour qu’il ne puisse pas poursuivre ses études. Une de leurs préoccupations était en effet de protéger d’éventuelles futures victimes parmi les patientes et les collègues de cet étudiant. Face à la légèreté de la peine, le parquet a fait appel de la condamnation, afin qu’il soit condamné à de la prison ferme et qu’il ne puisse jamais exercer la médecine. Le procès en appel aura lieu le 3 décembre à Orléans.
Quatre ans d’impunité
Il aura fallu attendre plus de 4 ans, le 10 octobre 2024 pour que, sous la pression de la mobilisation, une procédure disciplinaire soit lancée par l’université de Tours. Dès l’annonce de l’arrivée de l’étudiant, les syndicats CGT et SUD se sont mis en contact avec les collectifs qui avaient alerté durant des années sur cette situation. Des motions ont été votées dans toutes les instances du CHU de Toulouse demandant sa suspension, l’ensemble des organisations syndicales ont annoncé leur volonté de déposer une procédure de danger grave et imminent pour que les agents du CHU et les internes puissent exercer leur droit de retrait, un rassemblement de 300 personnes s’est tenu et enfin un préavis de grève avec appel à chaîne humaine autour de l’hôpital a été déposé pour le 4 novembre, jour prévu de son arrivée.
Des mots mais aucun acte
Durant près de 15 jours les syndicats et les hospitalierEs ont dû faire face à une direction qui tenait de belles paroles contre les VSS mais qui n’agissait pas, allant jusqu’à dire qu’ils allaient « aménager son stage » pour qu’il ne soit jamais seul.
Cette affaire illustre parfaitement l’impunité des agresseurs dans le milieu de la santé. Alors qu’une condamnation avait eu lieu, que l’interne reconnaissait une partie des faits, que les victimes avaient parlé et dénoncé les faits au sein des institutions, pendant près de quatre ans cet étudiant a pu poursuivre son parcours. Son avocat déclarait il y a quelques jours dans la presse que les faits reprochés ayant eu lieu dans le cadre « privé » rien ne pouvait lui être reproché dans le cadre de ses études.
La mobilisation reste d’actualité
Sous la pression de la mobilisation le directeur général de l’ARS d’Occitanie a enfin annoncé sa suspension le jeudi 24 octobre. Son avocat a annoncé faire l’appel, cette histoire est donc loin d’être terminée. Mais il s’agit d’une première victoire, et les syndicats CGT et SUD du CHU de Toulouse maintiennent leur appel à la grève et à rassemblement le 4 novembre, notamment si la suspension venait à être annulée. Ces organisations ont annoncé qu’elles prendraient leurs responsabilités afin que cet interne ne puisse pas exercer.
Pauline Salingue