Le soir du 2 novembre, la fusillade terroriste dans le centre-ville de Vienne, proche de la plus grande synagogue de la ville, a créé un choc dans la population autrichienne. La réaction du gouvernement a d’abord été d’appeler à la paix et à la solidarité, avec l’organisation de commémorations officielles associant des représentants de toutes les « communautés religieuses » du pays. Une réaction qui a pu surprendre, vu le discours xénophobe et sécuritaire que le gouvernement conservateur du chancelier Kurz affiche d’habitude.
Cette réaction prudente n’est pourtant pas si surprenante. Rapidement, médias et milieux politiciens bourgeois ont mis en avant de multiples révélations pointant les défaillances de la police et de l’État : certains de leurs représentants étaient au courant des préparatifs du terroriste ; il avait été en prison après avoir tenté de rejoindre la Syrie avant d’être libéré par anticipation pour bonne conduite ; il avait acheté des munitions récemment et était resté en contact avec des jihadistes allemands, etc. Fait d’autant plus fragilisant pour le gouvernement qu’un certain crédit que lui avait valu la gestion de la première vague de la Covid – l’Autriche au printemps dernier faisait quasiment figure de meilleur élève en Europe – s’est effondré, la situation sanitaire devenant hors de contrôle. Le soir de l’attentat était la veille de nouvelles mesures de confinement, la population en profitait et remplissait des bars du centre-ville…
Depuis, l’État autrichien est reparti à l’offensive. Avec la prudence qui sied à sa position inconfortable. Des perquisitions dans les locaux de groupes intégristes islamiques, mais surtout un nouveau souffle pour divers projets et gadgets sécuritaires, dont la possibilité d’arrestations « préventives », et autres mesures de surveillance. Et Kurz s’est lancé dans un axe « France-Autriche » avec son collègue Macron, pour « conciliabuler » sur de nouvelles mesures sécuritaires et des contrôles aux frontières à l’échelle européenne. La faute aux migrantEs : air raciste et xénophobe connu…
Les courants d’extrême droite à l’offensive
Le choc de l’attentat est d’autant plus important que l’Autriche a été jusqu’ici épargnée par des attaques terroristes jihadistes, contrairement à la France ou l’Allemagne, sans parler du reste du monde. Ce qui ne veut pas dire que des courants d’extrême droite ne se sont pas attelés aux tentatives d’encadrement des classes populaires immigrées. En juin, des attaques violentes, à coups de barres de fer et de couteaux, ont été menées par l’organisation d’extrême droite turque des « Loups gris ». Des locaux et manifestations kurdes, de l’extrême gauche turque ou autrichienne, ont été visés par ces gros bras encouragés par le régime d’Erdogan, qui tentent par ailleurs, dans le pays, de se donner une façade « républicaine », sous couvert d’associations et de listes municipales qui prétendent représenter la communauté turque et lutter contre l’islamophobie. Le gouvernement autrichien a montré quelque embarras lorsque des « héros » turco-autrichiens, qui avaient aidé des policiers blessés lors de l’attentat, se sont avérés proches de cette mouvance…
Comme en France, les classes populaires sont confrontées au piège de l’unité nationale derrière un gouvernement réactionnaire, xénophobe et raciste : Kurz, qui est un genre de double de Macron et qui, comme ce dernier, chasse de plus en plus sur les terres de l’extrême droite et tente d’utiliser dans son intérêt le terrorisme jihadiste. En s’en prétendant le pourfendeur, alors qu’il en est le pourvoyeur par ses discours de haine.