Dans un arrêt du 16 décembre, la Cour de cassation a confirmé la possibilité d’appliquer à Aurore Martin le mandat d’arrêt européen. Elle peut donc être remise à l’État espagnol pour des activités qui sont licites en France. Jeudi 16 décembre, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi d’Aurore Martin. Le transfert d’Aurore aux autorités espagnoles peut désormais intervenir à tout moment. Elle risque douze ans de prison pour s’être exprimée politiquement, en tant que membre de Batasuna, organisation de la gauche abertzale (nationaliste basque) qui est interdite en Espagne mais tout à fait légale et légitime en France. Nous sommes indignés et en colère. Après la manifestation du 4 décembre à Bayonne qui a rassemblé 2 000 personnes, la détermination au Pays basque est plus forte que jamais pour empêcher qu’Aurore soit livrée à l’État espagnol. Il y a déjà eu de nombreuses prises de position dans ce sens de la part d’organisations (nationalistes, PS 64, PCF, PG, NPA, Verts…), de syndicats (basques comme LAB, Solidaires, CGT, CFDT, FSU…), d’associations. Plus de 150 élus (des maires, des conseillers municipaux abertzales ou non, Borotra, sénateur-maire centriste de Biarritz, les députés Noël Mamère et Jean Lassalle…) ont signé une pétition demandant à la justice française de ne pas accéder à la demande de Madrid. Cela n’a pas fait reculer le gouvernement français, qui, répétons-le, sera le premier gouvernement d’Europe à appliquer le mandat d’arrêt européen à l’unE de ses ressortissantEs pour des raisons d’ordre politique. Lors de la session du 17 décembre, donc après l’aval donné par la Cour de cassation, plusieurs conseillers généraux de tous bords (UMP, PS, Modem…) se sont prononcés contre le transfert d’Aurore aux autorités espagnoles. Toutes ces prises de position sont des premiers pas positifs. Et les réactions doivent se multiplier bien au-delà du Pays basque, dans tout l’Hexagone. Il faut maintenant aller plus loin, multiplier les appels et les interventions, agir, participer massivement aux différentes initiatives qui seront proposées par le collectif qui, avec Askatasuna, l’association de défense des prisonniers politiques basques, mène la campagne. Exigeons l’arrêt des poursuites envers Aurore qui doit pouvoir militer en toute liberté ! Un précédent dangereuxLa décision de la Cour de cassation est très grave, d’abord pour Aurore, ensuite parce qu’elle crée un précédent. Pour la première fois, un État européen, l’État français, utilise le mandat d’arrêt européen à des fins de répression politique contre l’une de ses ressortissantes. Il la remet à un autre État européen, l’État espagnol, pour ce que Madrid appelle « des activités terroristes ». En France, elles n’en sont pas puisque Batasuna a pignon sur rue, se présente aux élections, etc. De fait, ces activités terroristes ne sont rien d’autre qu’une expression politique en réunion, meeting, conférence de presse. Aurore est en effet poursuivie pour avoir participé, en tant que membre de Batasuna, à une conférence de presse et trois réunions publiques tenues au Pays basque Sud (État espagnol) dans la période 2006-2007, durant la dernière trêve de l’ETA. Cette décision prise par le tribunal de Pau, confirmée par la Cour de cassation, est de fait politique. Alors que la gauche abertzale agit et s’exprime en faveur d’une résolution démocratique, pacifique et politique du conflit au Pays basque, les États espagnols et français accentuent la répression. Ce que Madrid appelle « la lutte antiterroriste » lui sert : - de prétexte pour nier ce droit élémentaire qu’est le droit à l’autodétermination pour le peuple basque, c’est-à-dire le droit d’être consulté, le droit de choisir son destin, - comme instrument de diversion, comme instrument de division entre travailleurs basques et non basques, face aux mesures d’austérité particulièrement fortes prises par l’État espagnol. Comme les autres États au service des grands groupes financiers et industriels, il fait payer la crise au monde du travail tout en essayant de masquer la politique qu’il mène. L’État français, lui-même bien avancé en matière de politique sécuritaire, marche main dans la main avec l’État espagnol.Il faut voir dans cette application du mandat d’arrêt européen (MAE) à Aurore Martin un dangereux précédent qui ouvre la voie : non seulement à son application à d’autres militants basques de nationalité française, avec l’objectif de l’illégalisation de Batasuna au Pays basque Nord, c’est-à-dire dans l’État français, mais encore à tout militant politique, syndical, associatif de l’espace européen particulièrement en cette période de crise. Nous sommes tous concernés, le MAE peut demain s’appliquer à n’importe lequel-laquelle d’entre nous. Les libertés d’opinion, de réunion, d’expression politique – droits démocratiques élémentaires – sont attaquées.Dès sa création, le mandat d’arrêt européen a été dénoncé par les organisations de défense des droits de l’homme comme permettant de museler les oppositions politiques. C’est ce qui se passe aujourd’hui au Pays basque, véritable laboratoire pour l’utilisation du MAE comme outil de répression aux mains des gouvernements. Nous ne laisserons pas faire ! Comités NPA d’Anglet et Mauléon