Comment les États-Unis devraient-ils répondre à la question de l’immigration ? La question sépare les Républicains des Démocrates et les progressistes des socialistes. Le problème a alimenté la montée au pouvoir de l’ancien président Donald Trump et a également contribué à sa chute.
Pour le moment, c’est une question politique brûlante, au centre de la première conférence de presse du président Joseph Biden, et le prétexte à l’envoi de délégations d’élus républicains à la frontière. Au centre même du problème se trouvent les enfants migrants, mineurs non accompagnés : près de 10 000 sont arrivés aux États-Unis en février et 18 000 sont actuellement en détention.
Des flux très importants
Trump a pratiquement démantelé le système étatsunien d’immigration tout en renforçant la patrouille frontalière et en mobilisant les services d’immigration et de douane (ICE) pour arrêter et expulser les immigrantEs sans papiers. Il a séparé les enfants de leurs familles et les a mis en cage, choquant la plupart des Américains. Mais avant lui, le président Barack Obama avait gagné la réputation de « déporteur en chef » pour avoir expulsé plus d’immigrantEs que n’importe quel autre président. Les Démocrates ont généralement soutenu un système d’immigration réglementé, un programme de travailleurEs invités et une voie vers la citoyenneté pour les immigrants sans papiers. La plupart des politiciens républicains et démocrates, y compris Sanders, soutiennent que l’immigration doit être restreinte et réglementée parce que les immigrantEs se disputent les emplois et acceptent des salaires inférieurs. Les Socialistes démocratiques d’Amérique (DSA) ont appelé à des « frontières ouvertes », bien que cette revendication trouve peu ou pas de réponse positive dans les cercles progressistes.
Aucun autre pays n’a un afflux d’immigrantEs aussi important. En 2018, la population étatsunienne née à l’étranger a atteint un record de 44,8 millions, soit 13,7 % de la population totale, le chiffre le plus élevé depuis les années 1880. Environ 77 % de touTEs les immigrantEs sont légaux, la plupart venant du Mexique, de Chine et d’Inde, d’autres d’Amérique centrale. Les 23 % qui n’ont pas de documents peuvent faire l’objet d’arrestations et d’expulsions. Chaque année, un million d’immigrantEs entrent légalement, environ 400 000 sont appréhendés à la frontière, tandis que des dizaines de milliers d’autres entrent sans papiers. Il y avait 10,7 millions d’immigrantEs sans papiers aux États-Unis en 2017, soit 3,2 % de la population.
Deux projets de lois
Avec l’élection de Biden, qui en tant que candidat avait parlé d’une politique d’immigration « plus humaine », les immigrantEs ont immédiatement afflué vers la frontière. À l’heure actuelle, en raison de la pandémie de coronavirus, Biden a demandé que les migrantEs ne viennent pas et qu’ils et elles ne soient pas admis, mais fuyant la violence politique ou criminelle et la pauvreté abjecte, beaucoup pensent qu’ils et elles n’ont pas le choix.
Lorsque des familles désespérées atteignent la frontière, elles envoient parfois leurs enfants seulEs à travers la ligne, sachant qu’ils ne peuvent pas être expulsés et qu’ils seront envoyés vivre avec des parents aux États-Unis. Cela a conduit à une forte augmentation du nombre de mineurEs non accompagnés, des nourrissons et des tout-petits aux adolescentEs, qui sont détenus à la frontière dans des établissements surpeuplés malsains et dangereux. Les Républicains affirment que Biden a provoqué une « invasion » d’immigrantEs.
Beaucoup de ces migrantEs viennent d’Amérique centrale et du Mexique. La première région a été dévastée par le soutien américain aux gouvernements de droite dans les guerres civiles des années 1980 et du début des années 1990. Quant au Mexique, il souffre toujours de l’Accord de libre-échange nord-américain de 1994, qui a transformé l’économie mexicaine sans créer les emplois adéquats. Dans les deux régions, les cartels de la drogue et les gangs criminels ont rendu la vie insupportable à beaucoup. Et désormais, le changement climatique y a créé de nouveaux problèmes pour les agriculteurEs.
La semaine dernière, à la demande pressante de Biden, la Chambre des représentants a adopté deux projets de loi, l’un établissant des voies vers la citoyenneté, tandis que l’autre offre un statut juridique à des millions d’immigrantEs sans papiers. Il n’est pas certain que ces textes passent au Sénat. Si ces réformes méritent un soutien critique, elles ne mettent pas fin aux inégalités du capitalisme ou à la violence de l’impérialisme qui alimentent les migrations forcées, et elles ne libèrent pas non plus les immigréEs de l’exploitation.
Traduction Henri Wilno