Publié le Jeudi 11 novembre 2010 à 14h01.

Israël : lois racistes...

Le gouvernement de coalition de droite et d'extrême droite israélien a approuvé le 10 octobre dernier un avant-projet de loi qui oblige les citoyens non-juifs à prêter un serment d’allégeance à Israël en tant qu’Etat juif. Mais ce projet n'est que la pointe de l'iceberg d'une vaste réforme législative visant à étouffer ou à interdire toute voix contestataire de la politique sioniste. (LCR-Web Belgique)

Serment d'allégeance et nationalisme en Israël

Meryl Streep, Spike Lee, Tim Robbins ou Susan Sarandon seraient-ils prêts à jurer fidélité et loyauté aux Etats-Unis et à ses dirigeants politiques afin de recevoir des subsides publics pour les films qu'ils réalisent, produisent ou dans lesquels ils jouent ? En Israël, Michael Ben Ari, député d'extrême droite de la Knesset (parlement), a déposé un projet de loi qui exige que toutes les équipes de films jurent fidélité à Israël comme Etat juif et déclarent leur loyauté à ses lois et à ses symboles, comme condition afin de recevoir un financement public. Et il ne s'agit là que d'une des nombreuses lois qui seront discutées pendant la session d'hiver de la Knesset et que plusieurs chroniqueurs du journal « Haaretz » ont caractérisé de « proto-fascistes ».

Comme dans la plupart des démocraties, tous les nouveaux citoyens israéliens doivent se déclarer loyaux envers l'Etat et ses lois, mais le gouvernement a décidé, le mois dernier, de soutenir (22 voix pour et 8 contre) un amendement à la loi de citoyenneté israélienne qui exige que tous les citoyens naturalisés prêtent un serment de loyauté au caractère juif de l'Etat. Dans un pays comme la Grande-Bretagne, cela reviendrait à exiger que des juifs, des musulmans ou des athés qui souhaient acquérir la nationalité britannique jurent non seulement loyauté aux lois anglaises, mais aussi à l'Eglise anglicane.

L'Association pour les Droits civils d'Israël a souligné que cet amendelent, qui deviendra bientôt une loi, n'est que la pointe de l'iceberg. Plusieurs lois actuellement prises en considération par la Knesset, et qui seront très probablement ratifiées, transformeront tout soutien à une politique alternative, comme par exemple l'idée qu'Israël devrait être une démocratie pour tous ses citoyens, en un crime.

Un autre amendement à la loi existante sur la citoyenneté stipule, par exemple, que les gens qui nient le caractère juif d'Israël pourront être arrêtés. Cet extension du code pénal, qui a déjà dépassé le stade de la première lecture parlementaire, incrimine ainsi une opinion politique. Une autre loi établi une base afin de refuser comme candidat aux administrations municipales sur des terrains publics ceux qui ne sont pas d'accord avec les points de vues politiques de ces administrations ou qui adhèrent à une religion différente. Le but est évidement de nier aux citoyens palestiniens d'Israël l'accès aux charges publiques dans les localités juives.

Autre loi qui a passé également l'étape de la première lecture, celle destinée à refuser tout financement public aux institutions qui commémorent la Nakba palestinienne de 1948. C'est comme si, aux Etats-Unis, ont refusait des fonds publics qui souhaitent commémorer l'esclavage des Afro-américains ou les crimes commis contre les Indiens d'Amérique.

Une autre loi vise explicitement les gens qui promeuvent ou publient du matériel qui puisse servir de base pour le boycott contre Israël. Selon ce projet de loi, également passé en première lecture, on pourra condamner toute personne reconnue coupable de soutenir le boycott à payer 8000 dollars de dédommagement aux parties plaignantes, et cela sans que ces dernières ne doivent apporter la moindre preuve d'avoir été lésées.

Enfin, huit membres de la Knesset proposent une loi visant à interdire les habitants de Jérusalem Est d'excercer un métier de guide touristique dans la ville, privant ainsi des centaines de personnes de leur travail. La justification avancée est que les habitants palestiniens de Jérusalem ne doivent pas exercer un tel métier car ils ne représentent pas suffisament bien « et de manière appropriée » l'intérêt national d'Israël.

Cette batterie de lois, dans la conjoncture historique présente, n'est pas due au hasard. Le conflit entre l'exigence démocratique élémentaire que tous les citoyens soient traités de manière égale et l'idéal ultra-nationaliste du sionisme semble définitivement tranché une fois pour toute.

Neve Gordon est un activiste israelien et auteur de « Israel’s Occupation » (University of California Press, 2008). Traduction française pour le site www.lcr-lagauche.be Source: http://www.counterpunch.org/gordon11052010.html