Le 14 mai, les snipers israéliens ouvraient le feu sur des manifestantEs palestiniens à Gaza, occasionnant un bilan humain effroyable : au moins 63 morts et près de 2500 blesséEs. Des mobilisations de protestation ont eu lieu aux quatre coins du monde et les condamnations ont afflué, auxquelles Israël a répondu par le cynisme, le mépris et les provocations.
« Chers soldats, tout comme vous nous protégez de la terreur du Hamas, nous vous protégerons des enquêtes internationales et des gangs hypocrites qui agissent contre Israël » : c’est le message tweeté par le ministre de la Défense Avigdor Liberman le 18 mai, qui en dit long sur l’état d’esprit des dirigeants israéliens.
« Violations du droit international humanitaire »
Quelques heures auparavant, le Conseil des droit de l’homme de l’ONU avait adopté une résolution préconisant la mise en place d’une commission d’enquête sur les crimes perpétrés, depuis le 30 mars et le début de la « Grande marche du Retour », par l’armée israélienne.
Le Conseil a voté le principe de l’envoi d’enquêteurEs chargés de faire la lumière sur « toutes les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire » à Jérusalem-Est et Gaza, « dans le contexte des assauts militaires menés lors des grandes manifestations civiles qui ont commencé le 30 mars 2018 », évoquant la possibilité que certains actes puissent être considérés comme des « crimes de guerre ». Les États-Unis, qui ont voté contre le texte – mais qui ne possèdent pas de droit de véto au Conseil des droits de l’homme – ont dénoncé, par la voix de leur ambassadrice à l’ONU, une enquête « sur la légitime défense d’un pays démocratique à sa propre frontière contre des attaques terroristes ». Des propos quasiment similaires à ceux de l’ambassadeur israélien, qui pousse un peu plus loin l’abjection : « Ce projet de résolution honteux n’est rien d’autre qu’une proposition de soutenir les crimes de guerre du Hamas contre Israël et les résidents de Gaza qui sont envoyés à la mort pour préserver sa domination. »
En finir avec l’impunité
Les chiffres publiés par le ministère de la Santé à Gaza sont pourtant sans équivoque : depuis le 30 mars, la répression israélienne a fait 112 mortEs et 13 190 blesséEs, parmi lesquels 2 096 enfants, 223 membres des services médicaux et 175 journalistes. Mais il n’y a guère d’illusion à se faire quant à l’issue d’une telle enquête. On se souvient ainsi du rapport Goldstone, rédigé après l’opération israélienne « Plomb durci » à l’hiver 2008-2009, qui avait établi de nombreuses violations des droits humains et des convention internationales (utilisation d’armes au phosphore blanc, bombardements d’hôpitaux ou d’écoles, utilisation de civils comme boucliers humains, etc.), sans être suivi d’aucun effet. Près de 10 ans plus tard, on comprend qu’un gouvernement dirigé par la droite et l’extrême droite et bénéficiant du soutien inconditionnel de la première puissance mondiale se sente autorisé à commettre, en toute impunité, des crimes de guerre.
Dans un tel contexte, l’organisation de la « Saison France-Israël » par les autorités françaises, qui a « pour ambition de montrer la vitalité de la relation bilatérale dans les domaines culturels et scientifiques, de marquer une nouvelle étape dans les relations économiques et de renouveler le regard que portent les Français sur Israël et les Israéliens sur la France », n’en est que plus scandaleuse, et nous nous joignons à celles et ceux qui exigent son annulation1.
Julien Salingue