Publié le Lundi 11 mai 2009 à 21h19.

Pour une Europe internationaLISTE

La déclaration de la Gauche anticapitaliste européenne fait émerger une voix politique à gauche de la gauche en Europe.

Voici un tour d'horizon des différents pays de l'Union européenne où se trouvent des organisations signataires. 

Allemagne 

Le fait notable de la situation de la gauche en Allemagne, ces dernières années, c’est l’émergence de Die Linke. C’est un pas en avant pour le mouvement ouvrier allemand, grâce à la radicalisation d’une série de militants issus des syndicats et de la social-démocratie, à l’Ouest. Mais il ne faut pas oublier que l’écrasante majorité de ce parti provient de l’ex-Parti communiste de RDA. Plus, le projet de sa direction se borne au retour à l’Etat-providence de la RFA des années 1970 et s’inscrit dans la recherche d’alliances avec la social-démocratie pour gouverner. Dans Die Linke comme à l’extérieur, les militants de la gauche anticapitaliste, qui n’ont pas d’illusions sur les alliances à venir avec le SPD, forment une nébuleuse active mais peu visible. Il faut souligner l’existence du réseau Gauche interventionniste, qui avait réussi le blocage du sommet du G8 à Rostock et qui a des relations avec la gauche anticapitaliste. Enfin, de petites organisations de la IVe  Internationale, comme l’ISL (présent dans Die Linke) et le RSB (qui anime des secteurs du mouvement social), joue un rôle actif. 

Angleterre 

La crise économique frappe de plein fouet l'Angleterre (les inégalités et le chômage explosent; les réductions de salaires se multiplient) et les grands syndicats (Unison, Unite, GMB…) offrent peu de résistance. Ce qui n'empêche pas le New Labour au pouvoir de réduire les budgets de l’éducation et de la santé, tout en dépensant 78 milliards d'euros pour les missiles nucléaires Trident. La plus grande organisation à la gauche du New Labour, le Socialist Workers Party (SWP, 5000 membres), est à l’initiative de la campagne contre la guerre et d’autres mobilisations sociales. Le Socialist Party, autre organisation marxiste bien présente dans les syndicats, a 1000 adhérents. Quant à la coalition Respect – que construit Socialist Resistance (proche de la IVe Internationale) –, affaiblie depuis le départ du SWP, elle reste active, notamment grâce à ses élus. Aux européennes, le RMT (syndicat des cheminots), le Parti communiste et le Socialist Party ont organisé une alternative antilibérale, « NO2EU », qui dénonce les privatisations et le manque de démocratie de l’Union européenne. 

Belgique 

La Ligue communiste révolutionnaire (LCR, section belge de la IVe Internationale) défend la perspective d'une nouvelle force politique anticapitaliste à gauche du PS et des Verts. Pour les européennes, elle avait proposé au Parti du travail de Belgique (PTB) et au Parti communiste (PC), principales organisations de la gauche radicale, de faire un front unitaire anticapitaliste. Mais l'accord n'a pas abouti, notamment du fait de la définition des bases politiques (anticapitalisme sans concession, rupture avec l'Union européenne…). Se présentant avec le Parti socialiste de lutte (PSL, équivalent belge de la Gauche révolutionnaire au sein du NPA), la LCR mène sa campagne sur trois axes: la mobilisation sociale d’ensemble; le plan d’urgence sociale et écologique; l'alternative globale, anticapitaliste et non productiviste, l’écosocialisme. Pour les élections au Parlement de la région de Bruxelles-Capitale, qui auront lieu le même jour, une unité large a été réalisée puisque PC, PSL, LCR et Parti humaniste se sont rassemblés sur une plateforme clairement anticapitaliste. 

Danemark 

L'Alliance rouge-verte (ARV)1 a été formée en 1989 par trois partis de gauche – le Parti socialiste de gauche, le Parti communiste du Danemark et le Parti socialiste des travailleurs – et par des socialistes indépendants. Aujourd'hui, l'ARV regroupe 4500 personnes et travaille main dans la main avec les 1000 membres du Front de la jeunesse socialiste – dont beaucoup sont également adhérents de l'Alliance. L'ARV s'appuie sur les mouvements extraparlementaires (notamment mouvements syndicaux et étudiants), mais se présente aux élections: elle a quatre députés et des élus municipaux dans quatorze villes, dont la capitale, Copenhague (9,5% des voix et un des sept maires de la ville). L'ARV s'oppose à la construction de l'Union européenne (UE), instrument du capitalisme européen, et particulièrement à la construction d'un Etat européen et à l'établissement d'une armée européenne. Aux élections européennes, l'ARV présente des candidats des deux mouvements critiques de l'UE, le Mouvement de Juin et le Mouvement des peuples contre l'UE (son leader, Soren Sondergaard, est député européen). 

1. L'ARV n'est pas signataire de la déclaration, mais entretient des rapports étroits avec la Gauche anticapitaliste européenne. 

Ecosse 

Le Scottish Socialist Party (SSP, « Parti socialiste écossais ») a été fondé en 1999, par le Scottish Militant Labour et d’autres courants plus petits venant du Parti travailliste, du Parti communiste, de la gauche nationaliste écossaise et du trotskysme, ainsi que par un nombre important de militants indépendants. En 2003, le parti obtient 130000 voix (pour 5 millions d’habitants) et six députés au Parlement écossais. Mais le projet subit un sérieux recul, du fait d’une scission survenue en 2006. Affaibli, le SSP perd tous ses députés aux élections de 2007. L'année suivante, lors de l'élection législative partielle de Glasgow-Est, sa candidate arrive en tête des candidats de la gauche. Les membres du SSP s'impliquent activement dans les campagnes contre la guerre, le nucléaire, en défense des droits de femmes, des homosexuels et des sans-papiers, en défense des services publics. Le SSP participe aux élections européennes et s'inscrit dans le projet d'une gauche anticapitaliste en Europe. 

Etat espagnol 

Izquierda Anticapitalista (IA, « Gauche anticapitaliste ») est une organisation se définissant comme révolutionnaire, anticapitaliste, internationaliste, alternative, féministe, écologiste, et s’efforçant d’impulser les luttes contre toutes les formes d’exploitation, d’oppression et de domination, que ce soit pour des raisons de genre, d’orientation sexuelle, de nationalité ou encore de culture. Elle lutte pour remettre au premier plan la nécessité d’une rupture permettant d’engager la construction d’une société socialiste autogestionnaire. IA a recueilli plus de 18000 signatures pour se présenter aux élections européennes. Sa campagne a commencé le 9 mai, avec le succès de ses meetings à Barcelone et à Madrid (lire page 11). IA est présente dans les principales villes, régions et nationalités de l’Etat espagnol, à Madrid, à Barcelone, en Andalousie, en Euskadi et en Galice. Les militants de IA sont aussi présents dans les mouvements sociaux et les syndicats de travailleurs. La crise actuelle ne fait que renforcer la nécessité de mettre au point une riposte internationale. Voilà pourquoi IA est partie prenante des efforts de mise en place d*fun front anticapitaliste européen et international. 

Grèce 

La gauche radicale grecque est aussi puissante socialement et politiquement qu’elle est fragmentée organisationnellement. La situation grecque se caractérise par un mouvement syndical imposant, une crise politique endémique et une corruption généralisée. Force considérable, la gauche radicale se confronte au Pasok (parti mi social-libéral mi populiste, rongé par la corruption) et à l’un des derniers partis communistes néostaliniens (le KKE). Synaspysmos, qui accueille une palette de courants réformistes de gauche, a formé une coalition, Syriza, avec des organisations et courants révolutionnaires (KOE, DEA, Kokkino), qui défend une série de positions radicales, dont certaines sont ouvertement anticapitalistes. Une autre coalition, Antarsia, comprend une série d’organisations révolutionnaires (SEK, OKDE, NAR), qui coopèrent ensemble aux européennes, dans une perspective anticapitaliste et clairement indépendante du Pasok. Les deux coalitions n*font pas de relations unitaires, mais elles participent aux réunions de la Gauche anticapitaliste européenne. 

Italie 

«  Incompatibles avec la guerre et le néolibéralisme », tel est le slogan qui a marqué la naissance de Sinistra Critica (SC, « Gauche critique ») en tant qu'organisation indépendante. Jusqu'en 2007, SC se battait au sein du Parti de la refondation communiste (PRC) pour contrer la dérive gouvernementaliste et modérée de la gauche italienne. Lorsque la majorité du PRC, en 2006, a décidé de participer au gouvernement Prodi (social-libéral), appuyant ainsi une politique de subordination au patronat, à la guerre impérialiste et aux diktats du Vatican, Sinistra Critica n’a pas renoncé à ses positions. Franco Turrigliatto, sénateur de SC, a été exclu du PRC pour avoir refusé de voter les crédits de guerre. La gauche italienne – PRC en tête – a été dévastée par sa participation au gouvernement Prodi. SC cherche à reconstruire une gauche vraiment utile, qui se batte pour un autre monde, dénonce la barbarie capitaliste et ne fasse pas de compromis avec le système. Sinistra Critica participe à la construction de la Gauche anticapitaliste européenne. 

Pologne 

Le Polska Partia Pracy (PPP, « Parti polonais du travail ») est né en 2001, à partir du syndicat Sierpien 80 (« Août 80 »), pour donner une nouvelle représentation politique aux travailleurs et construire un mouvement de résistance à l'exploitation. Les structures du PPP existent dans quatorze voïvodies (départements) sur dix-sept, l'implantation étant particulièrement forte en Silésie (sud de la Pologne, bastion ouvrier et industriel du pays). Le PPP recrute parmi les mineurs, les sidérurgistes, les ouvriers de l'automobile, mais aussi parmi les personnels des supermarchés. Aux législatives de 2007, il a obtenu 160476 voix (0,99 %). Il lutte pour le droit à l'avortement et le droit des femmes en Pologne. Aux européennes, le PPP exige l’arrêt des privatisations et des « réformes » néolibérales, la gratuité de l’éducation et de la santé, le retrait des armées polonaises d’Irak et d’Afghanistan, la semaine de travail de 35 heures, le salaire minimum à hauteur de 68% de la moyenne nationale… Comme aime à le dire Boguslaw Zieteck, son président, le PPP ressemble au NPA: un parti construit « par le bas » et résolument anticapitaliste. 

Portugal 

Le Bloco de Esquerda (BE, « Bloc de gauche ») est né en 1999 de la convergence de trois courants politiques: l’Union démocratique populaire (UDP), d’origine maoïste, le Parti socialiste révolutionnaire (PSR, membre de la IVe Internationale) et un courant issu du Parti communiste. Cette dynamique de rassemblement de la gauche anticapitaliste et les caractéristiques du champ politique portugais (Parti communiste très stalinien, absence des Verts, proportionnelle aux élections) vont permettre au BE, en s’appuyant sur des luttes sociales significatives, d’occuper très rapidement une place importante. Aujourd’hui, il compte autour de 7000 membres: c'est la cinquième force politique du pays (6,38% et huit députés en 2005; 5,3% à la présidentielle de 2006). Ces dernières années, il a mené campagne pour la dépénalisation de l’avortement, l’abolition du secret bancaire ou contre la guerre et l’impérialisme. Le BE, qui refuse de participer à un gouvernement avec le PS et le centre gauche, s'est impliqué, dès le début, dans la Gauche anticapitaliste européenne (il participe aussi au Parti de la gauche européenne). 

Suède 

Implanté dans une vingtaine de villes, le Socialistiska Partiet (SP, « Parti socialiste ») compte quelques centaines de membres actifs dans toute la Suède. Il exerce une influence dans certains syndicats, principalement dans les usines Volvo. Son ambition est de construire un parti des travailleurs non bureaucratique, où les décisions sont prises de manière démocratique, contrairement aux deux gros partis parlementaires de gauche, les Sociaux-démocrates et le Vänsterpartiet (« Parti de gauche »). Pour les élections européennes, avec d'autres forces anticapitalistes de toute l'Europe, le SP s'oppose au capitalisme. En Suède, il participe à la plateforme Initiative des travailleurs, à laquelle s'associent les Socialistes du Parti de la Justice («Rättvisepartiet Socialisterna») et des candidats indépendants. La plateforme et la campagne ont déjà gagné le soutien de représentants de syndicats locaux, petits mais importants, principalement au sein du syndicat des métallurgistes (IF Metall).