L’étau continue à se resserrer sur Daesh/État islamique (EI), et sur ses « capitales » Raqqa et Mossoul, tandis que les tensions militaires continuent à s’accentuer entre différents acteurs internationaux et locaux en Syrie.
Les forces armées irakiennes, assistées par des milices fondamentalistes chiites et soutenues par l’aviation de la coalition internationale, ont lancé leur offensive le 18 juin contre le dernier bastion de l’EI dans la vieille ville de Mossoul. Environ 100 000 civils irakiens restent piégéEs dans cette zone dans des conditions extrêmes. La perte de Mossoul serait un coup très dur porté à Daesh, mais l’assaut pour libérer la ville mené depuis presque huit mois n’a pas empêché la continuation des attaques terroristes meurtrières contre des zones civiles ailleurs en Irak.
Raqqa sous pression militaire
En Syrie, l’offensive militaire sur la ville de Raqqa – lancée depuis novembre 2016 par les Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les troupes du YPG (branche militaire du PYD kurde) accompagnées par quelques forces armées arabes – continue toujours pour chasser l’EI, avec l’assistance de la coalition internationale menée par les États-Unis. Après être entrées dans la ville le 6 juin, les FDS se sont emparées d’un quartier dans l’est et d’un autre dans l’ouest. Elles se situent maintenant presque aux portes de la vieille ville, qui est densément peuplée, ce qui devrait compliquer les opérations, comme c’est le cas à Mossoul.
Après la fuite de milliers de personnes ces derniers mois, l’ONU estime à 160 000 le nombre d’habitantEs qui y restent dans des conditions se détériorant de jour en jour. Les civils de Raqqa, en plus de souffrir de l’occupation de l’EI, ont subi les bombardements meurtriers de la coalition internationale. Une enquête des Nations unies sur les crimes de guerre a révélé qu’au moins 300 civils ont été tués à Raqqa lors des attaques aériennes US et de la coalition depuis mars.
Combats croisés en Syrie
Dans le même temps, l’armée syrienne et les milices soutenues par Téhéran ont intensifié leurs attaques et bombardements autour de Deraa au sud du pays, préparant une campagne à grande échelle pour reprendre toute la région aux groupes de l’opposition. Les civils sont toujours les premières victimes. Les troupes du régime de Bachar el-Assad se sont aussi emparées de nouvelles positions à l’ouest de Raqqa. Le régime Assad veut atteindre deux objectifs à travers cette avancée : sécuriser le flanc est de la province adjacente d’Alep et progresser contre l’EI dans les autres provinces de Homs et Deir Zor, également voisine de Raqqa.
Les avancées des forces pro-régime Assad ont renforcé les tensions locales et régionales entre différents acteurs. L’aviation étatsunienne a d’ailleurs abattu un avion de l’armée syrienne alors qu’il larguait des bombes près des FDS, soutenus par les États-Unis, dans la région de Resafa. L’appareil syrien a été abattu « dans un acte d’autodéfense collective », a affirmé l’US Central Command. La coalition a d’ailleurs déclaré dans un communiqué qu’elle « ne cherche pas à combattre le régime syrien ni les forces russes ou pro-régime », mais n’hésitera pas à défendre ses « forces partenaires de toute menace ». De plus, des combats ont éclaté le 18 juin entre les troupes du régime Assad et des FDS dans la province de Raqqa.
Des résistances populaires se maintiennent
Ces montées de tensions entre les différents pays et acteurs locaux ont été renforcées par l’avancée de l’offensive sur Raqqa de tous côtés et la volonté de contrôle de la bourgade syrienne d’Al-Tanf, à la jonction des trois frontières entre la Syrie, la Jordanie et l’Irak. Al-Tanf est devenu le point d’appui des forces spéciales américaines et britanniques, depuis que des troupes armées de l’opposition syrienne sont parvenues, avec un soutien des forces occidentales, à en déloger Daesh en mars 2016. Les forces américaines ont bombardé plusieurs fois des milices pro-régime se dirigeant vers Al-Tanf.
En même temps, les Gardiens de la révolution de la République islamique d’Iran ont annoncé avoir tiré le 18 juin depuis l’ouest de l’Iran une série de missiles contre « des bases de terroristes de l’EI » dans la région syrienne de Deir Zor. Ces tirs sont intervenus en « représailles » aux attentats perpétrés le 7 juin contre le Parlement et le mausolée de l’imam Khomeyni à Téhéran, qui ont fait dix-sept morts et ont été revendiqués par l’EI.
Dans ce contexte délétère, des résistances populaires se maintiennent dans les zones non occupées par le régime syrien et Daesh. Dans la province d’Idlib, des milliers de personne de la ville de Ma’arat al-Nu’man, sous le slogan « le peuple est plus fort que vous », ont manifesté dans les rues de la ville depuis le 11 juin pour protester contre les actes répressifs d’Hay’at Tahrir a-Sham (une coalition d’organisations militaires menée par Jabhat al-Nosra, anciennement Al-Qaïda). Cette coalition a en effet attaqué la base militaire de la Division 13 de l’Armée syrienne libre, tuant et emprisonnant plusieurs de ses membres.
Joseph Daher