Publié le Mercredi 14 septembre 2016 à 09h16.

USA : Obama au Laos : des excuses qui n’effacent pas les crimes

Après avoir assisté au G20 à Hangzhou en Chine, Barack Obama est allé au Laos pour le sommet de l’ASEAN (l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est).

Le Laos est le pays du monde qui a reçu le plus grand nombre de bombes par habitant. Au cours de la sale guerre du Viêtnam lorsque les USA ont voulu couper les voies d’approvisionnement du Nord-Viêtnam, ils ont largué plus de deux millions de tonnes de bombes : une bombe toutes les 8 minutes pendant neuf ans. Environ 30 % d’entre elles n’ont pas explosé, soit 80 millions de bombes à fragmentation qui ont depuis tué ou blessé plus de 20 000 personnes...

Obama a présenté ses excuses, tout en annonçant une augmentation de l’aide censée permettre de mettre fin à cette continuelle menace mortelle pour les Laotiens. Ces excuses tardives ne sont pas désintéressées, et viennent, cyniquement, servir les visées des USA en Asie.

Ces excuses au nom d’un « devoir moral » vis-à-vis des Laotiens ont bien peu de crédibilité venant d’un chef d’État qui agit dans la continuité de ses prédécesseurs, avec le même objectif de perpétuer, contre les peuples, le leadership de la première puissance mondiale.

La Chine en ligne de mire

Les gestes diplomatiques d’Obama visent à reprendre pied en Asie face à la Chine. « L’Asie-Pacifique sera plus importante dans le siècle à venir pour les États-Unis et pour le monde. En tant que nation du Pacifique, nous sommes là pour rester. Dans les bons comme dans les mauvais jours, vous pourrez compter sur les États-Unis d’Amérique », a-t-il déclaré pour justifier sa politique dite du « rééquilibrage ». En ligne de mire, la Chine dont l’émergence comme puissance mondiale est « bienvenue »... à condition cependant qu’elle se comporte en « acteur responsable ».

En clair, Obama entend définir un mode de coexistence qui lui permette de contenir le déploiement chinois, tout en gagnant des positions et des alliés. Et il redécouvre le respect de la souveraineté territoriale et de la liberté de naviguer, contre les ambitions maritimes de sa rivale en mer de Chine. Il entonne une vieille chanson : « la démocratie peut s’épanouir en Asie ». Il voudrait voir le Laos évoluer comme le « grand frère » vietnamien : une libéralisation de l’économie qui ouvre bien des portes, sinon à la démocratie du moins à des accords politiques, à l’image aussi du Cambodge et de la Birmanie.

La Corée du Sud a accepté, le 8 juillet, que l’armée américaine déploie sur son territoire un système d’interceptions antimissiles. Quant aux Philippines, elles se sont résolues en mars à rouvrir l’accès à cinq de ses bases aux soldats américains qui en avaient été expulsés à la fin de la guerre froide. Ancienne colonie américaine, elles demeurent l’un de ses plus proches alliés en Asie du Sud-Est, notamment au sujet des différends territoriaux avec Pékin sur la mer de Chine méridionale. Les deux pays sont liés par un traité d’alliance militaire que les récentes insultes de Rodrigo Duterte, le nouveau dictateur populiste, à l’égard d’Obama ne remettront probablement pas en cause.

Pour accentuer sa politique d’ouverture, Obama compte sur la ratification d’un accord de libre-échange (le TPP). Selon lui, « un échec n’aura pas seulement des conséquences économiques, il remettra en question le leadership de l’Amérique dans cette région vitale ». Le libre échange, c’est aussi le militarisme : bientôt, 60 % de la flotte américaine seront concentrés dans la région Asie-Pacifique.

Yvan Lemaitre