Après avoir réussi il y a deux ans à renverser l’arrêt Roe vs. Wade qui assurait la protection fédérale du droit à l’avortement, par la décision de la Cour suprême et après avoir adopté des restrictions à l’avortement dans plusieurs États qui ont pratiquement éliminé l’avortement, la droite préconise aujourd’hui l’élimination des pilules contraceptives.
Prétendant défendre les femmes qui pourraient être lésées par la contraception hormonale, et arguant qu’ils protègent également la dignité des femmes et la famille, les médias sociaux de droite ont lancé une campagne visant à mette fin à la « sexualité récréative ». Selon eux, l’élimination de la pilule contraceptive est une question féministe, bonne pour le corps et l’âme des femmes.
Offensive contre la « sexualité récréative »
Les arguments idéologiques de la droite contre la pilule, comme ceux contre l’avortement, sont formulés en termes de défense de la famille et des femmes elles-mêmes. La fondation conservatrice Heritage Foundation déclare que « ...les conservateurs doivent montrer la voie en redonnant à la sexualité sa véritable raison d’être et en mettant fin à la sexualité récréative et à l’utilisation insensée de la pilule contraceptive ».
Charles Rufo, militant de droite, affirme que « la pilule cause des problèmes de santé à de nombreuses femmes. Le “sexe récréatif” explique en grande partie pourquoi nous avons tant de familles monoparentales, ce qui favorise la pauvreté, la criminalité et les dysfonctionnements. Le but du sexe est de créer des enfants — c’est naturel, normal et bon ».
Une commentatrice de droite, s’exprimant sur X, suggère que la pilule contraceptive a souvent causé aux femmes de graves problèmes psychologiques et conduit à des relations sexuelles récréatives souvent « sans amour et dégradantes ». Elle affirme qu’il devrait y avoir « un mouvement féministe pour réapprivoiser le sexe et lui rendre son danger, son intimité et ses conséquences ». De cette façon, dit-elle, les femmes peuvent « renouer avec la plénitude de notre nature incarnée ». Les politiciens républicains ont repris ces arguments et certains proposent de restreindre ou d’interdire la pilule.
80 % des électeurEs jugent « très importante » la protection de la contraception
Il est peu probable que la plupart des femmes adhèrent à cet argument. La pilule contraceptive a été largement utilisée depuis 1960 par des dizaines de millions de femmes au cours des 60 dernières années, et bien qu’elle ne soit pas la meilleure forme de contraception pour toutes les femmes, et qu’un pourcentage relativement faible de femmes souffrent d’effets indésirables, la pilule a permis aux femmes de prendre le contrôle de leur propre vie. On parle souvent de la pilule en termes de « révolution sexuelle », mais elle a fait partie intégrante du mouvement de libération des femmes.
La pilule, largement utilisée par les femmes célibataires ou mariées, a permis aux femmes de planifier leur carrière et leur famille et, oui, d’avoir des relations sexuelles pour le plaisir quand elles le souhaitaient. Les femmes de la classe ouvrière et les femmes pauvres n’ont plus eu à avoir des enfants qu’elles ne pouvaient pas se permettre de prendre en charge, ou des enfants si nombreux qu’elles étaient submergées par le travail domestique et émotionnellement épuisées. La plupart des adolescentes ont leur premier rapport sexuel à l’âge de 16 ou 17 ans, mais certaines plus tôt, et c’est pourquoi les parents essaient souvent de les protéger contre les grossesses non désirées en prenant des dispositions avec un médecin pour qu’elles prennent la pilule contraceptive.
Un récent sondage national réalisé par Americans for Contraception, dont le New York Times s’est fait l’écho, a révélé que 80 % des électeurEs ont déclaré que la protection de l’accès à la contraception était « très importante » pour eux, et que même parmi les Républicains, 72 % considéraient le contrôle des naissances d’un œil favorable. Pourtant, les politiciens républicains tenteront probablement de restreindre l’accès aux pilules contraceptives. Ce mois-ci, dans l’État de l’Arizona, les Démocrates ont présenté un projet de loi visant à protéger l’accès à toutes les formes de contrôle des naissances, mais les Républicains l’ont rejeté. Les femmes et leurs alliés devront rester sur leurs gardes face à une nouvelle atteinte à leur liberté.
Traduction Henri Wilno