Publié le Vendredi 6 décembre 2024 à 09h00.

Justice : Quand la macronie s’en prend à la jeunesse

À l’initiative du groupe macroniste EPR (Ensemble pour la République) et de son président, Gabriel Attal, une énième proposition de loi durcissant la justice pour les mineurEs devait être soumise au vote des parlementaires le lundi 2 décembre (faute de temps, elle n’a pas été présentée). 

Son contenu n’est autre qu’une surenchère de vieilles recettes pour agiter le spectre de la délinquance juvénile qui serait le principal facteur d’insécurité. Des idées qui servent directement l’extrême droite. 

Pénalisation accrue

Il s’agit de la pénalisation accrue des parents dits « défaillants », de la comparution immédiate dès 16 ans — qui aura pour effet une augmentation de l’incarcération pour ces mineurs — et du « rabotage » de l’excuse de minorité (atténuation de la responsabilité pénale pour les mineurs).

Ces mesures auraient pu passer en catimini avec les voix de la droite et de l’extrême droite si elles n’avaient été bloquées au niveau de la commission des lois pour les deux dernières par une coalition du NFP, des centristes du groupe LIOT (Libertés, indépendants, Outremer et Territoire) et de Sacha Houlié, ancien président macronniste de la commission des lois qui a quitté depuis le groupe EPR.

Au final à la commission des lois, les macronistes ont voté contre le projet et préparent une bataille d’amendements pour revenir à la version initiale. La gauche et les centristes ont voté « pour » afin que la loi soit proposée au vote des parlementaires sans lesdites mesures. Les mesures pénalisant les parents n’ont pas été expurgées et notamment des circonstances aggravantes sont prévues pour les parents « d’émeutiers » ou de « trafiquants de drogue » avec des peines allant jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amendes.

Moins d’éducation, plus de répression

Ce débat parlementaire aurait donc dû avoir lieu, en donnant une place de choix à l’extrême droite. Et ce alors que la mise en place du code de la justice pénale des mineurEs en 2021 a déjà donné l’estocade à la priorité aux réponses éducatives, le fondement d’une justice pour les mineurEs, spécialisée, ­adaptée aux problématiques des adolescentEs. 

Depuis 2021, les mesures éducatives ont été raccourcies à trois mois, et la possibilité de juger un jeune s’il commet un nouveau passage à l’acte entretemps dans un délai d’un mois. C’est presque la comparution immédiate qui s’applique déjà dans les situations de récidive. 

Ces mesures ont eu pour effet une augmentation notable de l’incarcération des mineurEs, particulièrement les mineurs « non accompagnéEs » (MNA), les mineurEs raciséEs, les mineurEs des quartiers populaires mais aussi de certaines zones rurales défavorisées.

Depuis des décennies, de nombreuses études ont démontré que la prison, loin d’être une réponse à la délinquance juvénile est au contraire un facteur de récidive, une fabrique de délinquance.

Il faut une bonne dose de cynisme dans ce contexte pour utiliser cette thématique et cibler une population particulièrement vulnérable pour servir des jeux politiciens et dans le contexte actuel permettre toutes les surenchères à l’extrême droite et à un racisme décomplexé !

Perte du sens des professionnelLEs

À l’autre bout de la chaîne, les professionnelLEs de terrain subissent des conditions de travail de plus en plus dégradées et une perte du sens de leurs métiers éducatifs. 

Au milieu de l’été, l’administration leur a annoncé le non-renouvellement de plusieurs centaines de collègues sous contrat, ce qui les a amenés à être en grève : « Nous professionnels de l’éducation et du social au sein de la PJJ, ne lâcherons rien. Face au démantèlement de notre administration, restons solidaires, mobilisons-nous ensemble pour les jeunes que nous accompagnons, leurs familles et les collègues avec qui nous travaillons. »

Ils revendiquent un plan d’urgence et des moyens pour un véritable service public de l’éducation au ministère de la Justice.

Correspondante