Publié le Mardi 20 février 2018 à 21h24.

Macron veut dépenser 30 milliards pour embrigader la jeunesse

C’était une promesse de campagne du président Macron : instaurer un service national de plusieurs mois, obligatoire pour tous les jeunes de 18 à 25 ans. Et malgré les réticences de toutes les administrations et de l’armée, Jupiter, qui se mue en Mars, compte bien imposer aux jeunes de passer quelques mois avec les capitaines de l’armée pour leur inculquer un peu de nationalisme.

Tout d’abord, le projet. Pour l’instant, rien n’est fixé du côté du gouvernement, qui envisage encore plusieurs pistes. Ce qui est sûr, et c’est ce que le président a martelé, c’est sa volonté que le service soit obligatoire et qu’il dure au moins un trimestre, voire deux. 

Coût prohibitif en période d’austérité

Cependant, côté parlementaire, un rapport est en rédaction et devait sortir le 21 février, avec plusieurs pistes importantes : une « semaine annuelle de la défense et de la citoyenneté » entre 11 et 16 ans, réalisée dans le cadre du collège ou du lycée. Au programme, « défense et sécurité, résilience, droits et devoirs, mémoire et engagement » : tout un programme. Ensuite, une semaine au lycée, envisagée comme un « rite de passage » dans une caserne, en « immersion ». L’occasion pour l’État de remettre un « passeport citoyen » à tous les jeunes. 

Là où les désaccords se font sentir, c’est sur la partie post-18 ans : faut il un service national obligatoire ? Le coût prohibitif, de 30 milliards d’euros à peu près pour 5 ans, fait bondir tout le monde ou presque. Tout d’abord, l’armée n’en veut pas. Après le passage à la professionnalisation totale de l’armée française à l’occasion de la fin du service militaire en 1996, les différents corps d’armées ne veulent pas avoir à gérer 600 000 à 800 000 jeunes par an. Trop coûteux, une « perte de temps » pour beaucoup… C’est déjà une source de tension entre l’armée et le gouvernement, tension qui n’est pas nouvelle, comme l’éviction du chef d’état-major des armées l’a rappelé cet été. De plus, ni la droite ni la gauche ne veulent de service obligatoire. Mais pourquoi Macron s’acharne-t-il ?

Union nationale par l’embrigadement

Pour le président, l’objectif est clair : « un moment de rencontre entre la jeunesse de notre pays et la nation, et en partie son armée, mais ça peut être aussi un engagement civique, comment est-ce qu’on donne de son temps utilement à la nation ». En d’autres termes il s’agit, comme le faisait le service militaire, d’unir « la nation » autour de son armée, en effaçant (relativement), un temps, les distinctions sociales. Un projet d’union nationale dans un contexte social potentiellement explosif : il s’agit d’embrigader la jeunesse, de lui apprendre le respect, l’ordre et la discipline.

Seul appui – improbable – de Macron dans sa lutte pour le service national obligatoire et universel : La France insoumise qui, tout en critiquant la méthode Macron, a annoncé vouloir un service de… 9 mois pour tous et toutes, dans le but notamment de « renforcer la cohésion civique et le lien entre Armée et Nation ». Une fois de plus, le nationalisme mélenchonien se dévoile, quitte à attirer les foudres de certains jeunes en pleine mobilisation contre la sélection. Mais pour une gauche néoréformiste qui croit encore à la République version Jules Ferry, l’embrigadement de la jeunesse n’est que la continuité d’un projet national, prétendument de gauche. 

A.C.