Publié le Jeudi 12 janvier 2012 à 21h53.

DSK et le sexisme

L’affaire DSK a jeté une lumière crue sur la force des préjugés sexistes issus de l’organisation patriarcale de la société et la réalité maintenue de l’oppression des femmes. Tout y est passé. Les déclarations de certains hommes publics, ceux qui ont jugé les faits présumés impensables, ceux qui en ont minimisé l’importance. La montée au créneau d’intellectuels opposant le libertinage à la française au puritanisme étatsunien.

Ainsi, contre toute honnêteté statistique, on continue à considérer que le viol ne peut être le fait d’hommes respectables (BHL, qui défend son « ami », un justiciable pas comme les autres). Ainsi, on commence par mettre en doute la parole de la victime présumée (Jean-Marie Le Guen, qui évoque une « hallucination » de la jeune femme), avant de la rendre absolument invisible, en lui niant toute solidarité élémentaire (Ségolène Royal qui « pense d’abord à l’homme », et n’a pas un mot pour la victime présumée). Ainsi, on considère que dans le cadre de certains rapports de pouvoirs, un viol n’en est pas un (le « troussage de domestique » de Jean-François Kahn). Ou que le viol, s’il y eut viol, n’est pas si grave, puisqu’il n’y a pas « mort d’homme ». Manière de sous-entendre élégamment que la victime n’est, après tout, qu’une femme. Ainsi, on fait le choix d’empêcher Nafissatou Diallo de faire valoir le viol dont elle dit avoir été victime (on ne saura donc jamais ce qui s’est passé dans la chambre du Sofitel), en alléguant un manque de crédibilité, alors que celle de DSK peut aisément être mise en doute, des étapes de sa défense au dévoilement des conditions dans lesquelles les faits se sont déroulés.

Des accusations de Tristane Banon au Carlton de Lille en passant par le fiasco récent de la théorie du complot, gageons que l’affaire n’est pas tout à fait finie.

En attendant, elle a aussi permis de réveiller les consciences féministes. La décision du procureur affaiblit évidemment le rapport de forces déjà bien fragile des femmes victimes de viol. Mais dans le même temps, l’affaire DSK a partiellement libéré la parole, produit des prises de position, des mobilisations. Des collectifs, des groupes de femmes se sont mis en place.

En 2012 comme en 2011, notre solidarité pleine et entière va d’abord à Nafissatou Diallo et à toutes les femmes victimes de violences.

Ingrid Hayes