Près de trois mois après les législatives, Michel Barnier a déclaré devant les députéEs : « Nous sommes collectivement sur une ligne de crête ». Surtout lui…
C’est peu dire que le Premier ministre a « conscience de la gravité et de l’importance de ce moment pour notre action commune au service du pays et pour les Français qui nous regardent et qui nous écoutent ». Loin des tonalités martiales de Gabriel Attal en janvier dernier, l’ancien négociateur en chef de l’Union européenne a déroulé, le 1er octobre dans l’hémicycle, son programme d’une voix imperturbable.
Deux exigences, une méthode et cinq chantiers
Michel Barnier a manifestement cherché sur la forme à s’inscrire dans les pas du général de Gaulle, en se plaçant au-dessus de cette « Assemblée nationale divisée comme jamais elle ne l’a été depuis 1958 ». Il devient une sorte de deuxième Jupiter qui doit répondre à deux exigences : la dette financière et la dette écologique. La première en effet ne fait aucun doute, puisqu’elle est selon ses termes « la véritable épée de Damoclès ». Pour « ramener à 5 % en 2025 », avec une trajectoire qui doit permettre de « revenir sous le plafond de 3 % en 2029 », il préconise la réduction des dépenses publiques, un effort ciblé et limité dans le temps des plus riches et annonce la revalorisation de 2 % du smic le 1er novembre… au lieu du 1er janvier. Il a également déploré que les « dispositifs d’allégement de charges freinent la hausse des salaires au-dessus du smic ».
En appelant plusieurs fois au respect, au dialogue, aux partenaires sociaux, à l’idée de compromis, Barnier a donc irrémédiablement rompu avec macronisme. Il n’a, en revanche, en rien abandonné la politique de la bourgeoisie. Avec Barnier, la droite revient ! Elle se veut consensuelle et ouverte au dialogue… pour assurer la stabilité politique nécessaire aux affaires. Ainsi, Michel Barnier souhaite « réfléchir à des aménagements raisonnables et justes de la loi » sur les retraites et augmenter le pouvoir d’achat des Français, son premier chantier, dans lequel il inscrit l’écologie, mais avec quels moyens ?
La droite dure
Barnier n’a pas manqué de rappeler que « la fermeté de la politique pénale, que les Français demandent, est indissociable du respect de l’État de droit » en réponse à Retailleau qui avait jugé, sans que personne ne s’en émeuve, que l’État de droit n’était ni « intangible » ni « sacré ». Pourtant, toute la politique qu’il a déroulée en matière de renforcement de la police, de politique vis-à-vis des immigréEs, de renforcement de Frontex, de l’augmentation des OQTF… tout va dans le sens de Retailleau et de sa politique raciste (voir article page 3).
Hormis sur les « lignes rouges » données par la macronie, sur l’IVG, le mariage pour tous, et les dispositions légales sur la PMA, il poursuit la politique raciste de Darmanin dont il a, d’ailleurs, salué le travail… Il préconise de rendre les forces de l’ordre « encore plus visibles et présentes sur la voie publique ».
À propos de la Kanaky, il a annoncé que le projet de loi du dégel du corps électoral ne passerait pas devant le Sénat. Pas le choix sans doute… Car Barnier a d’autres urgences !
Un gouvernement raciste et technique
Le grand bourgeois Barnier n’a qu’un seul objectif : sortir un budget, dans un temps historiquement court, qui assure à la fois pour la stabilité sociale (toujours bonne pour les affaires) et la réduction du déficit.
C’est un gouvernement raciste et technique qui se projette sur les deux prochaines années et demie. L’Assemblée nationale apparaît plus déconnectée que jamais des préoccupations de la population. C’est désormais Gabriel Attal qui s’agite pour savoir si le gouvernement Barnier appliquera la réforme dite du « choc des savoirs ». On croit rêver… Barnier a d’autres urgences ! Mettre un gouvernement, non pas d’union nationale, mais d’union austéritaire.
Face à cette politique qui va s’appliquer très durement pour les personnes raciséEs, les étrangerEs, nous devons renforcer les fronts existants, les solidarités et les liens militants, dans nos syndicats, nos associations, nos quartiers, nos facs. Pour imposer les mesures d’urgence du Nouveau Front populaire, nous savons qu’il ne faudra compter que sur nous-mêmes !
Fabienne Dolet