Dimanche soir, en conclusion d’une non-campagne et comme symptôme d’une crise démocratique sans précédent, Macron a été réélu. Avec 58,5 % des suffrages exprimés, son libéralisme autoritaire l’a donc emporté sur le libéralisme crypto-fasciste et raciste porté par Le Pen. Le « tout-sauf-Macron » ne l’a pas emporté sur le « tout-sauf-Le-Pen », et c’est tant mieux pour notre camp social, tant cette dernière représentait un danger mortel. Mais les combats restent devant nous…
Le pire a donc été évité : en politique plus qu’ailleurs, deux maux, même très graves, doivent toujours être hiérarchisés. D’un côté une droite dure, ultra-libérale, technocratique, policière, liée aux vieux partis de gouvernement, à l’État et ses appareils, aux firmes du CAC 40, mais sans base sociale de masse et détestée par une grande partie du pays. De l’autre une extrême droite raciste mais lissée, démagogique et menteuse, en quête de respectabilité, avec malheureusement une certaine base populaire...
Le taux d’abstention s’élève à 28 % : il s’agit du second score le plus important de l’histoire de la 5e République... derrière l’élection de 1969 qui avait opposé deux candidats de droite. Près d’un tiers des électeurEs ne veulent même plus jouer cette comédie. Le nombre de votes blancs et nuls s’élève à plus de 3 millions (6,2 %), un chiffre là encore particulièrement élevé. En chiffres bruts, les abstentions représentent plus de 13,6 millions de « non-votes » (soit davantage que le score de Le Pen avec 13,3 millions de voix). Au total, Macron n’a donc été élu que par 38,52 % des inscritEs, soit le deuxième pire score de l’histoire de la 5e République.
Rouleau compresseur
La crise politique, démocratique, qui met en cause la légitimité de ce président à nouveau mal élu, s’accentue. Entre 2017 et 2022, Macron a perdu près de deux millions de voix. Son bilan négatif est sans appel, et ce second mandat s’annonce comme un approfondissement des attaques sociales, démocratiques et idéologiques réactionnaires. Le boulevard pour l’extrême droite devrait donc encore s’élargir avec une Marine Le Pen qui, de son côté, a gagné 2,7 millions de voix par rapport au second tour de 2017. Autant le dire : durant cinq ans, Macron, avec ses politiques racistes, autoritaires et antisociales, n’a nullement été un « rempart » contre l’extrême droite. Et au vu des intentions pour ce nouveau quinquennat, la tendance ne risque pas de s’inverser.
Le président a été mal élu et le sait, mais lui et son entourage ont été très clairs au soir et au lendemain du premier tour : ils comptent mettre en œuvre leur programme, tout leur programme, rien que leur programme. Et de toute évidence, ils n’ont pas l’intention d’attendre septembre, ni même juin, pour passer à l’offensive. C’est donc dès maintenant que la riposte doit s’organiser pour faire face à ce rouleau compresseur, sans attendre les élections législatives. Comme un symbole, Bruno Le Maire a d’ailleurs annoncé au lendemain de l’élection de Macron que le recours au 49.3 n’était pas exclu pour faire passer la réforme des retraites. Ça commence bien.
Faire face
Il y a urgence à tracer une perspective d’émancipation, à construire une gauche de combat. Le NPA est favorable à ce que dans les prochaines élections législatives, il y ait des candidatures d’union pour faire face à la droite et à l’extrême droite, sur la base d’un programme de contestation du macronisme et de rupture avec les politiques capitalistes. C’est la raison pour laquelle nous avons répondu positivement à l’invitation à discuter avec l’Union populaire, avec la ferme volonté d’aboutir à des candidatures unitaires à gauche.
Mais c’est aussi, et peut-être surtout, le troisième tour social qui s’ouvre dans la rue, sur nos lieux de travail et d’études, à commencer contre la « réforme » annoncée de nos régimes de retraite. Des luttes sociales à construire pour résister à l’offensive de Macron 2, condition indispensable pour changer la donne durablement. Et cela commence dès le 1er Mai, en étant le plus nombreux et nombreuses possible dans la rue pour faire entendre, une semaine après l’élection de Macron, notre détermination et notre refus d’une quelconque « trêve ».
Au-delà, et pour parvenir à construire une opposition résolue à Macron, avec la perspective d’une contre-offensive, nous aurons besoin à la fois d’unité et de radicalité. Partis, syndicats, associations et collectifs écologistes, antiracistes, féministes, LGBTI : il faut construire un front commun et durable de notre classe, articulant mobilisations de rue et batailles idéologiques, en particulier contre l’extrême droite. De ce front et des luttes multiples pourrait alors émerger une force politique anticapitaliste, antifasciste, féministe, écologiste et internationaliste, pour la transformation révolutionnaire de la société. C’est nécessaire et c’est urgent.