Publié le Mercredi 23 mars 2016 à 11h15.

Parti socialiste : Vers l’éclatement ?

Depuis les annonces de Hollande au congrès de Versailles, le PS semble en lambeaux. Et les résultats des législatives partielles montrent une tendance nouvelle : il est possible que le parti au pouvoir marche dans les traces du PASOK grec...

En effet, dans la 10e circonscription du Nord, le PS a obtenu... 11,2 % des voix, Les Républicains et le FN rassemblant respectivement 47 et 25 %. Dans l’Aisne, la candidate du PS avait obtenu 15,7 %, contre respectivement 36 et 29 % pour ses deux adversaires1. Ces scores sont le signe d’un décrochage complet de l’électorat du PS par rapport au parti...

Il faut dire qu’à l’intérieur du PS, les discussions sont extrêmement dures. Les courants autour de Benoît Hamon et de Pouria Amirshahi ont rompu les rangs sur le plan syndical : l’Unef est aux avant-postes dans la mobilisation, tandis que la pétition contre la loi El Khomri a été lancée notamment par Caroline De Haas et Sophie Binet (quelques mois au bureau confédéral de la CGT… jusqu’à la prise de contrôle par Martinez). Des secteurs de la CFDT, notamment dans la métallurgie, se sont désolidarisés de la position de la confédération. Aubry, Hidalgo et Montebourg ont signifié leur désaccord avec la déchéance de nationalité, le renforcement des pouvoirs de la police et la loi El Khomri.

De façon symétrique, Valls et Macron expriment de plus en plus leur volonté de se détacher complètement de cette « gauche » du PS. Valls a ainsi déclaré : « Le cycle du parti d’Epinay est derrière nous », il faut ériger à la place « une maison commune de tous les progressistes »... Il prend même ses distances avec Hollande : « Nous préparons mal la conquête du pouvoir, et confrontés à son exercice, nous ne l’expliquons pas. Alors expliquons ! Assumons ! »

« Jusqu’où s’arrêteront-ils ? »

…disait Coluche. C’est la question que l’on peut se poser en regardant la position des « frondeurs » et autres critiques, qui semblent se décomposer alors que leur positionnement pourrait être audible à une échelle de masse. En effet, Aubry et Hidalgo gardent leurs critiques pour les débats internes, amirshahi et De Haas ont quitté seuls le PS, les « syndicalistes » ne s’expriment pas dans le PS. Seule la députée Fanélie Carrey-Comte s’exprime publiquement, mais sans lien avec les autres composantes du PS. Tout cela ne peut évidemment mener à rien, mais il faut comprendre les racines de cette bataille sans issue qui se fonde sur deux problèmes fondamentaux.

Le premier est la séparation complète entre parti et syndicat. Les uns se fâchent sur le plan politique, les autres dans les syndicats. Sans percevoir que la lutte des classes ne supporte pas cette frontière : à quoi bon exprimer son désaccord dans le PS si l’on ne construit pas la mobilisation et la grève ? à quoi bon construire la mobilisation si l’on ne comprend pas qu’il faut s’affronter au gouvernement et au PS en tant que parti politique, en tant que projet de société ?

La seconde est une vision erronée de « la gauche ». Ces personnes – gens d’appareil, anciens ministres, militantEs sincères – ont en commun de croire qu’il y a une unité de la gauche, alors que celle-ci est depuis toujours partagée entre des secteurs extérieurs au mouvement ouvrier, prêts à une collaboration ouverte avec la classe dominante, et des secteurs plus ou moins indépendants, plus ou moins radicaux, liés au mouvement ouvrier. Tant que ces secteurs garderont comme horizon politique l’unité de la gauche, ils ne pourront pas construire une gauche qui représente, même un peu, les intérêts des classes populaires. Sans même parler de la rupture révolutionnaire avec le capitalisme…

Antoine Larrache

  • 1. Lutte ouvrière obtient 3 % et 2,2 %, ce qui n’est pas rien pour des élections où la participation n’a pas dépassé 30 %...