Les discussions sur le budget ont commencé par le rejet du volet « recettes » en commission il y a une semaine. L’ampleur de la déroute surprend quand même : seuls les députéEs Renaissance ont voté le texte. De proches alliés de Macron votant contre (LR) ou s’abstenant (Modem, Horizon et LIOT), mettant encore plus à nu l’isolement du pouvoir.
En commission, tous les amendements proposés par les partis du Nouveau Front populaire (NFP) ont été systématiquement rejetés par les députéEs macronistes, la droite et l’extrême droite, notamment l’instauration de la « taxe Zucman ». Un député RN peut ainsi déclarer : « On se réjouit que nos propositions et nos idées prennent de l’ampleur et qu’elles trouvent une majorité dans cette Assemblée. » Ainsi le PS tient dans sa main le gouvernement, et c’est le RN qui imprime sa marque sur le budget. Les discussions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) sont du même acabit.
Quelle stratégie pour la gauche ?
On se demande donc bien ce que les partis du NFP espèrent à se jeter dans une bataille parlementaire perdue d’avance. Les discussions parlementaires autour des amendements relèvent uniquement d’un exercice d’amoindrissement de la violence des projets gouvernementaux. C’est ouvertement le projet du PS. EÉLV assume davantage l’approfondissement de la crise tout en annonçant la candidature de Marine Tondelier pour 2027 comme moyen d’obtenir une primaire à gauche. Et on a l’impression que l’arène parlementaire sert surtout à LFI à régler ses comptes avec le PS. Mais le pire de tout ça est le brouillage des lignes quand on voit se multiplier les votes communs au RN et à la gauche. Si la gauche d’accompagnement semble avoir un projet cohérent, celui d’une possible gauche de rupture est difficilement lisible.
L’impasse d’une solution institutionnelle
La priorité donnée à la joute parlementaire paralyse le mouvement social. En l’absence du recours au 49-3, on voit mal comment la sortie sera autre chose que la version initiale du budget imposée par ordonnances (et donc sans les « gains » qu’aurait obtenus la gauche) ou bien une censure et un retour à la case départ. Le mouvement social ne peut rester l’arme au pied alors que le pouvoir est si faible. Cette séquence voit aussi le retour à une dichotomie « la rue pour les syndicats, la lutte parlementaire pour les partis » que le NFP avait permis d’assouplir. Cette séparation est, elle aussi, paralysante.
Vite, reprendre l’initiative dans la rue !
Certaines coordonnées de la séquence restent inchangées. La crise économique est là, les difficultés quotidiennes de la vie pèsent plus que jamais, et l’inflation semble faire son retour. Le risque de l’arrivée du RN au pouvoir n’a jamais été aussi grand. L’extrême droite est plus que jamais en embuscade, engrangeant passivement le bénéfice du pourrissement institutionnel et de la farce parlementaire.
Toute une partie du mouvement social semble paralysée par la crainte de l’approfondissement de la crise politique qui mènerait à une dissolution et à une victoire électorale du RN. Pourtant, la seule voie de sortie favorable pour notre camp social passe par les mobilisations. Reprendre la main par les luttes porte un double objectif stratégique : construire le rapport de forces pour imposer un programme d’urgence et développer des cadres d’auto-organisation pour sortir de la passivité, du parlementarisme, de l’électoralisme. Il nous faut chercher à convaincre que nous avons collectivement la puissance de renverser la situation.
La nécessaire unité de la gauche sociale et politique
Le mouvement Bloquons tout semble dessiner une date de mobilisation le 15 novembre. Le 22 novembre aura lieu une importante mobilisation annuelle, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences sexistes, sexuelles et de genre. Le 29 novembre aura lieu la première manifestation nationale unitaire en solidarité avec la Palestine depuis le commencement de la guerre génocidaire il y a deux ans.
Pour que la donne soit modifiée, il faut que l’ensemble de la gauche sociale et politique reprenne l’initiative, dans l’unité, par des meetings communs, un plan de mobilisation, une manifestation nationale unitaire… Le NPA-l’Anticapitaliste sera de toutes les initiatives qui permettraient de relever la tête et de construire par l’action commune une alternative à l’austérité et à la fascisation.
William Donaura