Publié le Mercredi 5 février 2025 à 14h08.

La poule aux œufs d’or des formations privées

Si l’ESR public subit crises structurelles et conjoncturelles, les formations supérieures privées en profitent et se développent à grand pas dans un Far West réglementaire orchestré par l’État.

 

Le nombre d’étudiantEs dans le privé progresse largement avec désormais 26 % des étudiantEs inscritEs, contre 20 % en 2017 et 14 % il y a vingt ans. Les subventions directes de l’État ont progressé de 20 % en cinq ans contre 12 % pour le public. Grâce à une politique volontariste de soutien au privé depuis l’arrivée au pouvoir de Macron au pouvoir.

Apprentissage très subventionné et copinage

Dès 2018, Muriel Pénicaud, ministre du Travail, octroyait de généreux financements aux formations privées, notamment à travers l’apprentissage dont le financement est passé de 320 000 euros en 2018 à 835 000 euros en 2022. Avec une prime à l’embauche de 6 000 euros par contrat, de nombreuses entreprises ont profité de ces largesses publiques.

Aujourd’hui, 80 % des formations supérieures par alternance relèvent du privé. Et l’on est loin de l’apprenti formé au sein de la PME locale. Ce sont bel et bien de grands groupes capitalistes qui ont largement su profiter de ce marché ouvert et déréglementé : Galileo (propriété de la holding de la famille Bettencourt), Omnes Education (fonds d’investissement britannique). Ces groupes ont su par ailleurs profiter du pantouflage et du copinage du personnel politique. Muriel Pénicaud, quelques années après avoir ouvert les vannes de l’apprentissage, n’est aujourd’hui rien de moins que… membre du conseil d’administration de Galileo. 

La formation privée encouragée

Avec la mise en place de Parcoursup’ et la sélection à l’entrée de l’université, de nombreux jeunes se tournent vers les formations privées auxquelles la plateforme offre une visibilité sans précédent. Enfin, avec une dépense par étudiantE qui a chuté de 16 % entre 2012 et 2022, les conditions d’accueil au sein des établissements publics ont largement dégradé le service public.

L’argent public coule à flots pour ces formations privées : pas moins de 25 milliards d’euros pour l’apprentissage, soit le même volume que le budget du ministère de l’ESR. À travers ce transfert d’argent public massif vers des groupes capitalistes opéré par Macron et ses gouvernements, la phrase du Manifeste du parti communiste prend tout son sens : « Un gouvernement moderne n’est qu’un comité qui administre les affaires communes de toute la classe bourgeoise ».

Et tandis que les actionnaires se gavent, les étudiantEs trinquent : appellations mensongères de diplômes, formations en distanciel, reconnaissances trompeuses, frais d’inscription frauduleux…. Pour la Direction des fraudes, 30 % des écoles privées ont des pratiques commerciales trompeuses/douteuses, soutenues par un marketing commercial agressif.

Dès la fin des années 1990, le patronat et ses relais institutionnels œuvraient à créer une « économie de la connaissance » et un grand « marché des services d’enseignement ». Vingt ans plus tard, la destruction du service public de l’ESR est largement entamée, les formations très nettement adossées à des finalités professionnelles directes pour les besoins du patronat, l’État organisant la socialisation des pertes et la privatisation des profits.

Personnels, étudiantEs, familles doivent se mobiliser pour mettre fin à cette vente à la découpe qui ne profitera ni à l’enseignement ni à la recherche.