Publié le Lundi 5 avril 2010 à 12h49.

Portugal : le droit à l’avortement arraché par la mobilisation

 

Le 11 février 2009, une majorité d’électeurs portugais (59,25 %) répondait Oui à la légalisation de l’avortement. C’est là le fruit d’une longue lutte.

En 1998, un premier référendum avait débouché sur un Non, en partie à cause d’une abstention très importante (68 %). Renvoyées au droit en vigueur, les femmes étaient dans une situation catastrophique : l’avortement était condamné par une peine de trois ans de prison (sauf en cas de viol ou de danger pour la mère) et les femmes étaient obligées d’aller jusqu’en Espagne, à Badajoz, pour décider librement. Entre 20 et 40 000 avortements par an avaient ainsi lieu en toute illégalité...

C’est le procès de Maia, en 2001, concernant 43 prévenues dont 17 femmes ayant avorté (les autres étaient accusées d’appartenir à des réseaux clandestins d’avortement) qui a permis de relancer la mobilisation. Ce jugement a, en effet, déclenché un grand mouvement de solidarité avec les femmes accusées, souvent d’origine modeste. La mobilisation a donc pu rebondir sur ce procès : une plateforme « Pour le droit de choisir » a ainsi été créée et a appelé à de nombreuses manifestations devant l’entrée de la cour de Maia et à Lisbonne.

Un nouveau référendum a eu lieu en 2009. Si les partisans du Oui ont bénéficié d’une division de ceux du Non (certains étaient pour modifier la loi - qu’ils jugeaient trop libérale - pour forcer les femmes violées à poursuivre leur grossesse...), c’est surtout une campagne de terrain importante qui a permis la victoire !

Aujourd’hui, sur le papier, c’est gagné et c’est une victoire importante pour les droits des femmes. Mais dans la pratique, tout reste à faire. La majorité des hôpitaux ne sont pas prêts à effectuer les IVG par manque de moyens et d’organisation des services, et les cliniques privées risquent de s’imposer face au manque d’investissement dans le secteur public. Comme en France, la loi, nécessaire, ne suffira pas à imposer un réel droit de choisir !

Emmanuelle Rio