Les flammes sont hautes, la fumée masque le soleil, la terre reste noire jusqu’à ce que les pluies d’automne emportent les cendres et la mémoire des gens. La zone des espèces très sensibles au feu s’étend sans limites. Les industries forestières au Portugal sont nombreuses et variées : l’industrie de la cellulose, du MDF, des palettes, du bois traité (passerelles, terrasses, poteaux, etc.) ; l’exploitation forestière qui va de l’abattage aux plantations, au débroussaillage ; l’industrie des audiences télévisées, l’industrie des études et la plus protéiforme : l’industrie des incendies de forêt. Tout ce qui touche aux incendies de forêt contribue au PIB du Portugal, jusqu’à la reconstruction des habitations grâce à des subventions – ou aux larmes et aux sacrifices économiques des propriétaires déchirés. C’est ainsi que les incendies de forêt sont « des cornes qui nourrissent, il faut donc les laisser pousser »1.
Le bois des arbres brûlés continue sa vie dans l’engrenage économique. Il subit une certaine dépréciation, mais le propriétaire qui, quelques semaines auparavant, pensait tout avoir perdu, s’en accommode. L’eucalyptus repousse grâce à la résistance au feu de ses nombreux bourgeons dormants. Après deux ou trois hivers, il est débarrassé de sa noirceur et le bois est prêt à alimenter la pâte à papier blanc. L’écorce épaisse du pin sylvestre isole le bois du feu, lui permettant ainsi d’être utilisé à diverses fins industrielles.
Dès les premières vagues de chaleur de l’année suivante, tout recommence, car l’enfer des incendies de forêt au Portugal abrite de nombreux paradis.
Maria Carolina Varela2 (traduction du portugais, Luiza Toscane)
Article source : https://fr-fr.facebook.com/MCarolinaMCV
- 1. L’équivalent de « Bien des hommes acceptent d’être cocus s’il doit leur pousser des cornes d’abondance » Gilbert Cesbron (NDLT)
- 2. Ingénieure en sylviculture. Se reporter à son article : Les incendies de la forêt portugaise : pire, c’est mieux ? - L’eucalyptus et les prédateurs (économiques) de la forêt - Europe Solidaire Sans Frontières (NDLT)