Publié le Lundi 21 avril 2014 à 13h04.

Essai : Une histoire sans les hommes est-elle possible ?

Sous la direction d’Anne-Marie Sohn, ENS Éditions, 2013, 21 euros.

Sous un titre volontairement provocateur, les diverses contributions à cet ouvrage collectif nourrissent une réflexion sur la construction de l’identité masculine. En s’attardant sur des périodes délimitées (de la préhistoire à l’époque moderne) et des champs culturels et sociaux définis, il s’agit d’historiciser la notion de masculinité pour en analyser les enjeux dans des contextes précis.

Il ressort de cette étude que la codification des comportements sociaux genrés est absolument conjoncturelle. Ainsi, des termes comme « virilité », « masculinité », « manhood » ont progressivement évolué, de même que les exigences de comportement et de mentalité formulées par la société à l’égard des hommes. Mais ce qui émane également de ces textes, c’est que l’identité sexuelle fut, à toute époque, traversée de contradictions. La question du genre est bien évidemment poreuse au système politique. La hiérarchisation sur fond de discrimination sociale, raciale, économique (entre autres) participe pleinement de la construction des identités masculines. 

Si l’analyse des pratiques sociales genrées à l’époque antique ou médiévale n’est pas dénuée d’intérêt, les articles consacrés aux comportements contemporains sont bien plus parlants. La construction d’une identité masculine gay au tournant des années 1970 et le « virilisme ouvrier », compromis par les mobilisations sociales et les luttes émancipatrices des femmes, sont autant de sujets qui doivent nous interpeller comme faisant partie de notre histoire militante.

À l’heure où « les managers du capitalisme international propagent une nouvelle masculinité, largement popularisée dans les médias internationaux et les manuels de management », nous n’en avons pas terminé avec les questions du genre et de l’identité, même si nous savons désormais que celles-ci ne peuvent s’aborder qu’au pluriel. 

Sophie Coudray