Cette année, les journées d’action internationales en commémoration de Tchernobyl, à Bourges, ont eu un impact particulier du fait de la catastrophe de Fukushima. Pour la deuxième année consécutive, le NPA18, membre du réseau Sortir du nucléaire s’est investi dans les journées d’action internationales en commémoration de l’accident de Tchernobyl. Cette année l’opération « Changeons d’ère, sortons du nucléaire » a vu grandir son impact après l’accident toujours en cours de Fukushima. Le choix du type d’opération choisi a du coup pris un autre sens. Le kiosque d’information-discussion installé devant la poste de Bourges toute la journée du samedi a permis aux Berruyers de constater par eux-mêmes l’impasse énergétique nucléaire française, l’aveuglement dû à des décennies de bonne conscience « nucléolâtre », la confiscation du débat public au nom du caractère trop complexe des enjeux. Une exposition temporaire en liaison avec le groupe Alerte uranium de Bourges a également permis de montrer une autre facette du nucléaire : l’utilisation militaire, industrie encore importante dans le Cher. Il existe à Bourges abrite, un site militaire, le polygone, où sont testés les armements de l’armée française. Entre 1990 et 2001, on y a expérimenté, en près de 1 400 tirs à l’air libre, des armes à uranium appauvri. L’uranium appauvri est un sous-produit de l’enrichissement de l’uranium à partir de l’uranium naturel. C’est un matériau de fabrication d’obus antichars, et notamment des « obus-flèches » utilisés lors de la première guerre du Golfe, au Kosovo, durant les premières phases de la guerre en Irak (2003-2005) et actuellement en Libye. L’uranium appauvri est le cheval de Troie de la guerre nucléaire car il continue d’irradier et de tuer après les combats. En outre, comme tous les métaux lourds, il se fixe sur les organismes et augmente considérablement les risques de leucémie. Dans le cas d’un obus d’artillerie, le « pénétrateur » est une barre filetée, composée d’uranium appauvri. Pendant l’impact, l’uranium s’échauffe et atteint sa température de fusion, qui est inférieure à celle de l’acier ; il crée avec le fer du blindage un eutectique1, ce qui provoque la fusion du blindage et participe à la perforation, en projetant le métal liquide dans l’habitacle. Cela se propage dans la cible et tout ce qui est inflammable va prendre feu voire exploser ; par ailleurs, l’uranium pulvérisé qui pénètre dans l’habitacle s’enflamme également, d’où l’explosion des chars de combat environ cinq secondes après l’impact. Cette combustion de l’uranium appauvri donne la poudre d’oxyde d’uranium. Les poussières ainsi produites se répandent dans l’atmosphère, elles mesurent moins de 1,5 micron. Elles sont donc respirables, peuvent se déposer dans les alvéoles et être absorbées par le système lymphatique ou le sang. Connaissant les effets de ces armes sur les populations de l’ex-Yougoslavie, d’Afghanistan, d’Irak et sur les soldats étatsuniens qui les ont utilisées (cancers, leucémies, malformations congénitales), on peut redouter les conséquences sanitaires au voisinage du périmètre de ces tirs, notamment près du polygone où ces armes et ces munitions étaient testées. Ces armes étant toujours utilisées aujourd’hui, il est difficile de croire que les essais auraient cessé depuis dix ans. Quels sont leurs effets sur la santé humaine ? Quand fera-t-on l’analyse des sols et des eaux ? Quelle est la masse d’uranium disséminée sur le champ de tir du polygone ? Le site a-t-il été décontaminé ? Comment a-t-on contrôlé la santé des personnels qui ont participé aux essais ? Et celle des habitants voisins du site militaire ? La dernière résolution soumise à l’ONU concernant la transparence des données relatives à l’utilisation des armes à uranium appauvri a été adoptée par une large majorité (141 États pour, 36 abstentions). Seuls quatre États ont voté contre : les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et Israël. Le nucléaire civil ou militaire conduit l’humanité à la barbarie. Cette industrie est un concentré de toutes les erreurs du capitalisme, notamment l’irresponsabilité techno-industrielle contre laquelle aucun principe de précaution n’est efficace. En finir avec le nucléaire, c’est en finir avec tous les mensonges de cette industrie, c’est repenser entièrement notre politique énergétique.
Marie Avril1. Mélange de deux corps purs qui fond et se solidifie.