La mobilisation contre le chlordécone et les autres pesticides s’approfondit, avec notamment une manifestation prévue samedi 7 novembre à Fort-de-France.
Rappelons qu’une dérogation a autorisé l’épandage de cet insecticide contre le charançon des bananeraies dans les Antilles pendant deux ans après que le produit a été interdit en France en 1990, et qu’ensuite la puissance coloniale a laissé les patrons et l’importateur du produit, le béké Bernard Hayot, écouler leurs stocks : la pollution a continué, avec des conséquences majeures sur l’ensemble de l’écosystème antillais.
La pollution des sols, des nappes phréatiques et de l’environnement littoral marin, touche une part de la production alimentaire (notamment les tubercules), des animaux d’élevage et des poissons et crustacés. TouTEs les habitantEs sont concernés par la consommation des produits locaux et de l’eau, s’ajoutant dans le cas des agriculteurEs à l’exposition directe au produit.
La crise sanitaire qui en résulte est très grave : 95 % des GuadeloupéenEs et 92 % des MartiniquaisES présentent de la chlordécone dans leur sang. L’exposition in-utero est associée à une réduction de la mémoire visuelle immédiate, le nombre de cancers de la prostate explose, et les ouvriers des bananeraies connaissent souvent des problèmes de stérilité masculine. Ces derniers sont encore exposés aujourd’hui à certains pesticides potentiellement nocifs pour la santé, comme le glyphosate, le lindane ou le paraquat.
« Abominable tragédie »
À l’initiative d’un cadre unitaire très large en Martinique, « Lyannaj pou depolye martinik », une visioconférence internationale s’est tenue le 3 octobre dernier avec des organisations de Martinique, Guadeloupe et de l’Hexagone (notamment Attac, la Confédération paysanne, la Fondation Copernic, Solidaires).
Un appel international en est issu, exigeant que tous les responsables économiques et politiques de cet empoisonnement rendent des comptes, que cessent le harcèlement, la répression policière et judiciaire contre les militantEs engagés dans ce combat, et que l’État assume totalement sa responsabilité en prenant les mesures et moyens à la hauteur de la situation, en particulier pour garantir à brève échéance le zéro chlordécone dans l’alimentation. Il exige la dépollution des milieux, la détoxication des personnes, l’indemnisation, le suivi médical et psychologique gratuit de toutes les victimes, la remédiation des préjudices économiques subis par les marins-pêcheurEs, les aquaculteurEs, les agriculteurEs, l’accélération de l’attribution de terres en friche à des cultivateurs et cultivatrices sans terre, avec des aides et un protocole pour une agriculture nourricière exempte de tout pesticide et biocide, la fourniture de tous les matériels et de l’encadrement technique nécessaires pour le développement des alternatives (jaden pann, jardins suspendus, jardins agro-forêts…).
Une manifestation se tiendra ce samedi 7 novembre à Fort-de-France, et se discute la mise en place en 2021 d’un grand procès citoyen international mettant en cause les responsables de l’empoisonnement par les pesticides.
L’appel se conclut en affirmant « que l’abominable tragédie dont sont victimes les peuples est la preuve de la nécessité de sortir d’un monde infesté par les produits toxiques, tout particulièrement les pesticides, à la recherche effrénée du profit à courte vue, aux conséquences et coûts désastreux (eaux contaminées, écocide…) pour l’ensemble du Vivant », avec un appel à la solidarité aux Antilles, en France et ailleurs, auquel le NPA se joint avec détermination.