Publié le Mercredi 2 février 2022 à 11h11.

Ukraine : Biden envoie des troupes en Europe de l’Est mais ne bénéficie pas d’un soutien unanime

Le président Joseph Biden a commencé à envoyer des troupes US dans les pays d’Europe de l’Est – quelque 8 500 soldats ont été mis en état d’alerte – mais aucun soldat ne serait envoyé en Ukraine, qui n’est pas membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan). S’agit-il d’un premier pas vers la guerre ?

Le président Vladimir Poutine a mobilisé quelque 140 000 soldats qui menacent l’Ukraine, en grande partie en raison de l’alignement croissant du pays sur l’Occident, et plus particulièrement parce que la Russie s’oppose à son adhésion à l’Otan. Le gouvernement ukrainien a en effet exprimé le souhait d’adhérer à cette organisation, les nations européennes et les États-Unis s’y opposent pour l’instant.

« Il n’y a pas de solution militaire pour sortir de cette crise »

Joe Biden a également mis en garde le président russe Vladimir Poutine au sujet de sanctions économiques qui seront « énormes » et « sévères » si la Russie envahissait l’Ukraine. Les sanctions contre les banques, les entreprises et le gazoduc Nord Stream 2 auraient sans doute un effet dévastateur sur l’économie russe, mais affecteraient aussi peut-être les économies de l’Europe, voire du monde entier. L’opposition de Biden à Poutine peut également être motivée par la crainte que si les États-Unis restent passifs, cela pourrait encourager Xi Jinping, le leader chinois, qui aimerait s’emparer de Taïwan.

Au Congrès, la leader de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a accéléré l’adoption d’un projet de loi prévoyant une aide militaire de 500 millions de dollars à l’Ukraine et l’imposition de nouvelles sanctions à la Russie. Certains membres de la Chambre se sont plaints que la procédure accélérée, qui élimine une grande partie du débat, conduira à des solutions militaires plutôt que diplomatiques.

Du côté démocrate, le Progressive Caucus, qui compte 97 membres à la Chambre et un (Bernie Sanders) au Sénat, a publié une déclaration disant : « Nous continuons à observer avec inquiétude le comportement menaçant de la Russie envers l’Ukraine. Il n’y a pas de solution militaire pour sortir de cette crise – la diplomatie doit être au centre des préoccupations. Nous soutenons les efforts de l’administration Biden pour étendre et approfondir le dialogue, permettant des négociations robustes et des compromis. Nous sommes très préoccupés par le fait que de nouveaux déploiements de troupes, des sanctions radicales et aveugles, ainsi qu’un afflux de centaines de millions de dollars d’armes létales ne feront qu’accroître les tensions et les risques d’erreur de calcul. La stratégie de la Russie consiste à attiser les tensions ; les États-Unis et l’Otan ne doivent pas entrer dans cette stratégie. » Bernie Sanders a critiqué Poutine pour ses menaces contre l’Ukraine et a appelé à des solutions diplomatiques, mais n’a pas voulu spéculer sur les options militaires.

« Stop War with Russia »

La question du soutien à l’Ukraine a ébranlé le Parti républicain, des commentateurs et des politiciens de droite influents s’opposant à l’aide militaire à l’Ukraine et certains soutenant même Vladimir Poutine. Donald Trump, qui admirait Poutine et soutenait tacitement la Russie sur diverses questions, s’oppose à l’implication des États-Unis, déclarant que l’Ukraine « est un problème européen. » Ainsi, un effet secondaire de la controverse sur l’Ukraine a été de provoquer un clivage, au moins sur cette question, au sein du Parti républicain qui, jusqu’à présent, était uni derrière Trump,

L’extrême gauche étatsunienne s’oppose depuis longtemps à la guerre et au militarisme. Les Socialistes démocratiques d’Amérique (DSA), par exemple, appellent à l’abolition de l’Otan. La plus grande organisation antiguerre des États-Unis, « Act Now to Stop War and End Racism » (ANSWER), a appelé à des manifestations le 21 janvier avec le slogan « Stop War with Russia ». ANSWER, cependant, est une organisation campiste dont certains membres soutiennent en fait la Russie. En raison de l’omniprésence du Covid Omicron, du froid qui sévit dans une grande partie du pays et de la faiblesse du mouvement antiguerre, la participation a été faible et il n’y a pas eu de couverture médiatique.

Les menaces de la Russie envers l’Ukraine ont modifié le paysage politique en matière de politique étrangère. Une partie de l’extrême droite et une grande partie de la gauche campiste affichent désormais une sympathie pour la Russie. Démocrates et républicains néo­libéraux ainsi que, pour des raisons très différentes, la gauche internationaliste, soutiennent l’Ukraine face à la Russie. Le gouvernement étatsunien veut manifester sa force et étendre son influence, tandis que nous, la gauche internationaliste, nous opposons à la Russie, à l’Otan et aux États-Unis et soutenons l’autodétermination de l’Ukraine.

Traduction Henri Wilno