Division par deux du nombre de régions, suppression de la clause de compétence générale pour les départements et les régions, suppression des départements... Dès sa prise de fonction, Valls a annoncé la couleur : il entend faire franchir un pas à la réforme territoriale en chantier depuis des dizaines d’années.
Fonctionnaires et services publics dans le collimateurCes déclarations prennent place dans la série de mesures annoncées depuis sa prise de fonctions : il faut « poursuivre l’effort contre les déficits », et il faut donc que cet « effort soit partagé »... par les collectivités territoriales. En même temps tombait le rapport commandé par Hollande à Malvy, président PS de Midi-Pyrénées et Lambert, président de droite de l’Orne : le « hasard » fait bien les choses ! Ils y expliquent comment les collectivités territoriales pourront s’accommoder de la coupe à venir de 11 milliards d’euros des dotations de l’État : les diverses instances territoriales devront délibérer sur le temps de travail des fonctionnaires... Un système de bonus-malus incitera les communes à se regrouper, à mutualiser leurs ressources, autrement dit à prendre leur place dans la course à la suppression de postes de fonctionnaires... À tous les niveaux de l’État, c’est une purge drastique des effectifs qui est programmée, avec son corollaire : la régression des services publics.
Adapter les structures de l’État aux besoins de la bourgeoisie Mais la purge menace aussi une multitude d’élus qui siègent dans ces assemblées, « atterrés » par l’annonce de Valls à l’image de Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements. Invité à l’émission « 28 minutes » d’Arte, il y bataillait contre la réforme annoncée. Il compte sur les parlementaires pour s’y opposer, car sinon, ils « scieraient la branche sur laquelle ils sont assis »... Au contraire, d’autres, tel Rousset, président de la région Aquitaine et de l’association des présidents de régions, disent « chiche monsieur le Premier ministre ». Lui bataille pour une spécialisation et une affirmation des compétences de régions, adaptation nécessaire selon lui des structures de l’État aux besoins « de la société » – comprendre « du patronat » : aide aux entreprises, formation professionnelle adaptée à leurs besoins, transports, pôles de compétitivité, etc.
Un serpent de mer à terrasserCe sont ces intérêts contradictoires qui expliquent pourquoi la décentralisation de l’État, commencée en 1982-83 avec les lois Defferre, a tout du serpent de mer. Pour les gouvernements, il s’agit d’adapter des structures territoriales qui datent, avec les communes et les départements, de la révolution de 1789, à une évolution considérable des structures économiques, démographiques, techniques et sociales du territoire... tout en faisant des « économies d’échelle » ! Sur cette voie, ils se heurtent bien plus aux éluEs qui défendent leur perchoir qu’aux fonctionnaires et aux populations qui en subissent les conséquences. Il est plus que temps d’inverser les choses.
Daniel Minvielle