Publié le Jeudi 13 mai 2021 à 10h40.

Au procès de Bure, nous sommes toutes et tous des malfaiteurs ! (tribune)

Début juin se tiendra le procès des opposant·e·s au projet Cigeo d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure (Meuse) pour «association de malfaiteurs». Un collectif d’associations et de personnalités affirme sa solidarité avec les sept prévenu·e·s et demande la relaxe.

En juin, cela fera quatre années que les portes des opposant·e·s au projet Cigeo d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure ont volé en éclat sous les coups de boutoir d’une instruction pour «association de malfaiteurs». Vingt domiciles perquisitionnés, dix militants et militantes interdits de se voir pendant deux ans et demi, 100 téléphones placés sous écoute, 16 années cumulées de communications enregistrées, des balises posées sous des voitures, un escadron de gendarmes mobiles harcelant les habitants et habitantes au quotidien… Cette scandaleuse traque d’Etat a tenté de paralyser ce mouvement de lutte vieux de 30 ans contre le plus gros projet industriel européen, dont les risques sont connus.

Le 1er, 2 et 3 juin se tiendra le procès des inculpé·e·s «malfaiteurs» de Bure. Nous, universitaires, artistes, autrices, journalistes, syndicalistes, éditeurs, auteurs de bande dessinées, activistes, avocat·e·s, scientifiques, élu·e·s, ami·e·s, affirmons notre profonde solidarité.

Bure nous concerne toutes et tous parce que c’est un des laboratoires de la généralisation de l’autoritarisme en France – depuis les quartiers populaires jusqu’aux luttes écologistes en passant par les gilets jaunes. Le 1er juin sera le procès de l’autoritarisme et de «l’association de malfaiteurs», dispositif pénal hérité des lois scélérates et de l’antiterrorisme qui dote les autorités de moyens de surveillance colossaux pour paralyser toute forme d’organisation collective.

Le procès d’un système capitaliste et productiviste

Bure nous concerne toutes et tous, parce que le projet Cigeo est indispensable à la relance de la filière nucléaire française. Cette industrie est à un moment charnière et joue son va-tout pour obtenir la construction de 6 nouveaux EPRs, alors que les vieilles centrales rafistolées sont plus dangereuses que jamais, que ses coûts explosent, que les déchets débordent. Le 1er juin sera le procès de l’énergie nucléaire, qui se prétend meilleure alliée du climat mais s’impose depuis des décennies dans un déni total de démocratie et verrouille toute transformation profonde de nos systèmes énergétiques.

Bure nous concerne toutes et tous, parce que c’est un territoire emblématique de toute la résilience et la résistance qu’il nous faut conjuguer pour fabriquer dès maintenant des mondes désirables sans attendre un hypothétique «monde d’après». A Bure, il n’y a pas eu besoin d’attendre la pandémie de Covid-19 : la catastrophe agro-industrielle et écologique menace de transformer la région en désert social. Le 1er juin sera le procès d’un système capitaliste et productiviste de plus en plus irrespirable qui sacrifie les vies et les territoires au nom du profit.

Bure nous concerne toutes et tous, parce qu’en dépit de la répression énorme, cette lutte où se mêlent plusieurs générations est l’un des foyers vitaux où s’allient des manières d’habiter un territoire contre une industrie mortifère, de reprendre en main nos conditions d’existence et d’inventer des relations libérées des rapports de domination. La lutte pour des vies dignes et heureuses se joue aussi, singulièrement, à Bure.

Si lutter à Bure de multiples manières équivaut à faire partie d’une «association de malfaiteurs», si se sentir touché·e·s par ce qui se joue au sein de ce territoire en lutte est suspect, alors : nous sommes toutes et tous des malfaiteurs !

Nous sommes solidaires des sept prévenu·e·s de Bure et nous en demandons la relaxe. Nous demandons l’abandon du projet Cigeo.

Premiers signataires : Corinne Morel-Darleux, écrivaine et conseillère régionale ; Geneviève Azam, économiste ; Pablo Servigne, auteur et chercheur in-Terre-dépendant ; Alain Damasio, écrivain ; Eric Beynel, syndicaliste ; Jérôme Baschet, historien ; Isabelle Frémeaux, activiste et artiste ; John Jordan, activiste et artiste ; Christophe Bonneuil, historien ; Miguel Benasayag, philosophe ; David Dufresne, journaliste ; Étienne Davodeau, auteur de bande dessinée ; Guillaume Meurice, humoriste ; Yves Cochet, ancien ministre de l’environnement ; Alessandro Pignocchi, auteur de BD ; Jean-Marc Rochette, auteur de bande dessinée et peintre ; Jules Falquet, sociologue ; Adel Tincelin, auteurice, traducteurice ; Elsa Dorlin, philosophe ; Nathalie Quintane, écrivain ; François Jarrige, historien ; Isabelle Stengers, philosophe ; Bénédicte Zitouni, sociologue ; Marie Toussaint, députée européenne EE-LV ; David Cormand, député européen EE-LV ; Julien Bayou, secrétaire national d’EELV ; Sandra Regol, secrétaire nationale adjointe d’EELV ; Alain Coulombel, porte-parole d’EELV ; Jean-Luc Mélenchon, député LFI ; Mathilde Pannot, députée LFI ; Christine Poupin, porte-parole du NPA ; Thierry Bonnamour et Xavier Fromont, porte-parole Confédération Paysanne Auvergne-Rhône-Alpes ; Elie Lambert, secrétaire national Union syndicale Solidaires ; Julie Ferrua, secrétaire nationale Union syndicale Solidaires ; Franck Gaudichaud, historien ; Ali Boulayoune, enseignant-chercheur ; Hugues Jallon, président des éditions du Seuil ; Rémy Toulouse, éditeur ; Flore Roumens, éditrice ; Nicolas Haeringer, chargé de campagne de 350.org ; Odile Hélier, anthropologue ; Matthieu Rigouste, associé ; Les Ogres de Barback, groupe de musique ; HK, chanteur ; Danakil, groupe de musique ; Antoine Back, adjoint au Maire de Grenoble ; Maxime Combes, économiste ; Camille Louis, philosophe et dramaturge ; Sezin Topçu, chercheuse ; Dominique Bourg, philosophe ; Ludivine Bantigny, historienne ; Renda Belmallem, militante ; Fanny Madeline, historienne ; Claire Tatin, réalisatrice ; Jean Gadrey, économiste ; Frank Barat, journaliste ; Michel Kokoreff, professeur des universités ; Alexis Zimmer, enseignant-chercheur ; Michèle Rivasi, députée européenne ; Flore Roumens, éditrice ; Frank Bergeron, dessinateur et éditeur ; Josep Rafanell i Orra, psychologue, écrivain ; Vincent Verzat, vidéaste-activiste ; Florent Massot, éditeur ; Johan Badour, éditeur ; Sophie Gosselin, philosophe ; Serge Quadruppani, écrivain et traducteur ; Alèssi Dell’Umbria, auteur-réalisateur ; Yves Frémion, ancien député européen ; Laure Noualhat, réalisatrice et auteure ; Catherine Zambon, autrice ; David Gé Bartoli, philosophe ; Xavier Mathieu, comédien ; Camille de Toledo, auteur ; Roland Desbordes, physicien ; Karine Parrot, enseignante-chercheuse ; Christian Mahieux, syndicaliste ; François Cusset, écrivain ; Francine Bavay, conseillère régionale honoraire ; Paul Poulain, spécialiste des risques et des impacts industriels ; Gauthier Chapelle, chercheur in-Terre-dépendant ; Aurélien Gabriel Cohen, doctorant et membre de la revue Terrestres ; Emmanuel Lepage, auteur de bandes dessinées ; Camille Besombes, épidémiologiste ; Sara Aguiton, sociologue ; Jean-Marc Salmon, chercheur en sciences sociales ; François Chesnais, économiste ; Benoit Rougelot, architecte du vivant ; Florence Cerbaï, conseillère régionale ; Tancrède Ramonet, réalisateur et chanteur ; Pierre Khalfa, Fondation Copernic ; Emilie Hache, philosophe ; Christiane Vollaire, philosophe ; Odile Hélier, anthropologue ; Leyla Dakhli, historienne ; Marie-Pierre Vieu, journaliste et editrice ; Alessandro Stella, directeur de recherche au CNRS ; Emmanuel Dockès, professeur de droit, université Lyon 2 ; Michèle Riot-Sarcey, historienne ; Bertrand Berche, universitaire ; Isabelle Krzywkowski, universitaire, syndicaliste ; Fabrice Flipo, professeur ; Marnix Dressen-Vagne, enseignant-chercheur émérite ; Laurent Jeanpierre, politiste ; Alice Canabate, sociologue, vice-présidente de la Fondation d’Ecologie politique ; Georges Menahem, directeur de recherche au CNRS ; Jean-Marie Harribey, économiste ; Bruno Alonso, chercheur CNRS ; Mathilde Larrère, historienne ; Jacques Testard, biologiste ; Helène Gaudy, écrivaine ; Pacôme Delva, physicien ; Fabrice Capizzano, écrivain ; Stéphane Trouille, réalisateur ; Yannis Youlountas, réalisateur ; Gwen de Bonneval, auteur de bande dessinée ; Gilles Kuntz, ancien adjoint à Grenoble ; Frédéric Boone, chercheur ; Jean Rochard, producteur de musique ; Françoise Boireaud, animatrice d’un espace culturel ; Corinne Iehl, sociologue ; Gilles Martinet, géographe ; Luc Chelly, auteur ; Olivier Royer, conseiller fédéral EE-LV ; Matthieu Goeury, coordinateur artistique Centre d’Arts Vooruit ; Gaëtan Dorémus, illustrateur ; Julie Maurel, militante ; Anne-Sophie Trujillo Gauchez, entrepreneuse en SCOP ; Efflamm Omnes, assistant Pédagogique ; Marianne Fischman, professeure de SES, militante féministe ; Estelle Bardin, professeure ; Olivier Piazza, enseignant à l’université ; Jean-Luc Kop, enseignant-chercheur ; Danielle Moyse, professeur de philosophie ; Frédérique Muller, chargée de projet culturel ; Laure Plassard, enseignante ; Frédéric Delarue, historien ; Bénédicte Thevenot, enseignante ; Alain Dutech, chercheur INRA ; Jean Malifaud, maître de conférences ; Delphine Grenez, professeur ; Josyane Ronchail, géographe ; Cécile Veillard, Enseignante ; Bertrand Berche, universitaire ; Marion gentilhomme, éditrice ; Clément Cordier, enseignant ; Gaël Leveugle, artiste ; Luc Quinton, plasticien ;

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