C’est le titre choc du livre de Guillaume Coudray, qui dévoile la présence d’un solvant hydrocarbure, l’hexane, dans de nombreuses huiles alimentaires, la viande, les laitages, le beurre. Pour le seul bénéfice des industriels de l’agroalimentaire, car on sait de longue date qu’il est neuro- et repro-toxique.
Extraire plus pour gagner plus. Les méthodes traditionnelles n’extraient que 75 à 80 % de l’huile des graines de soja, tournesol, colza. L’hexane permet d’en extraire jusqu’à 99 %. Mais il reste de l’hexane dans le produit final. On le retrouve aussi dans viande, lait, produits lactés, beurre, margarine ou lait infantile, puisque les animaux d’élevage sont nourris aux tourteaux de soja traités. L’hexane passe dans le lait maternel pour se fixer au niveau des graisses cérébrales du nourrisson, dans un cerveau en pleine formation. Les produits végétariens, qui utilisent des protéines végétales industrielles à base de soja, extraites à l’hexane, en contiennent beaucoup, quand ils ne sont pas bio.
La bascule vers l’élevage industriel fait de l’hexane la norme
Avant l’importation massive du soja, au tournant des années 1960, les éleveurs paysans nourrissaient leurs animaux avec ce qu’ils produisaient à la ferme ou dans leur région. La bascule vers l’élevage industriel intensif va détruire cet équilibre, et nécessiter l’utilisation massive de tourteaux de soja, que l’industrie agro-alimentaire va fournir à moindre coût. Les autorités favorisent alors l’implantation d’usines d’extraction à l’hexane, un processus industriel qui extrait plus, réduit les besoins de main-d’œuvre, dans des structures de grande échelle. Rentabilité avant tout, même si rapidement on sait que l’hexane est dangereux pour la santé !
En effet, dès les années 60 apparaissent des troubles neurologiques chez des cordonniers italiens et japonais qui utilisent des colles à l’hexane. De nombreuses études scientifiques documentent les risques neurologiques et reprotoxiques de l’hexane, même à faible dose. L’hexane participe à la montée des troubles neurologiques, maladie de parkinson, troubles du neurodéveloppement, troubles de la fertilité qu’on constate depuis des années. Mais il a fallu attendre 2024 pour que l’hexane soit classé par les autorités européennes comme neurotoxique avéré et non plus suspecté.
Hexane, nitrites, polluants éternels, pesticides, à chaque fois les industriels, suivis par les autorités sanitaires, déclarent qu’à faible dose, ces polluants n’ont pas d’effet, notamment sur les femmes enceintes, les nourrissons. Et les industriels de proclamer : nous respectons les doses ! Or ces doses minima ne sont appuyées sur aucune étude médicale solide, sur aucune étude de l’effet cocktail, mais simplement sur les doses minima que laissent les procédés industriels. Il existe des alternatives à l’hexane. Les produits bio et l’huile d’olive n’en contiennent pas. Après une explosion en 2018, l’usine de Dieppe du groupe Avril n’utilise plus l’hexane pour extraire l’huile. On peut donc s’en passer.
Interdire l’hexane dans nos assiettes !
Imposer la présence de l’hexane sur les étiquettes, dont la mention n’est pas obligatoire, puisque c’est un auxiliaire technologique, et pas un additif ? Taxer l’hexane comme le proposait le député Modem Richard Ramos, dans un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale, en octobre 2024 ? Et laisser au consommateur le soin de passer des heures devant les étiquettes pour traquer l’hexane, mais aussi les nitrites, les pesticides ? Laisser le consommateur arbitrer entre son portefeuille et des produits bio sans hexane, reproduisant les inégalités sociales jusque dans les assiettes ? Plus simple, plus rapide, plus égalitaire, il faut imposer à l’État, à l’Union européenne, aux autorités sanitaires d’interdire l’hexane de nos assiettes, mais aussi d’interdire l’importation des produits qui en contiennent, car nos vies valent plus que leurs profits.
Franck Prouhet